Ces recommandations ont été élaborées par un groupe de travail réuni par l'Agence Nationale pour le Développement de l'Evaluation Médicale et par la Société Française de Radiologie et d'Imagerie Médicale.
I - CHAMP D'APPLICATION DES RECOMMANDATIONS :
Ces recommandations portent sur l'emploi et le choix des produits de contraste iodés hydrosolubles en cas d'injection par voie intraveineuse lors des examens tomodensitométriques et des urographies.
II - RISQUES LIES A L'UTILISATION DES PRODUITS DE CONTRASTE IODES :
L'incidence des accidents lors de l'utilisation d'un produit de contraste iodé par voie intraveineuse est très faible.
L'ordre de grandeur du risque de décès est de 1/100 000 (0,001 %), celui des accidents majeurs (définis par la nécessité d'une intervention thérapeutique quelle qu'elle soit) est de 1/2 000 (0,05%), et celui des incidents mineurs de 1 % (à l'exclusion de la sensation de chaleur lors de l'injection).
Les situations pour lesquelles un surcroît de risque a été démontré ou est seulement suspecté sont :
- insuffisance cardiaque sévère ;
- insuffisance rénale ;
- état de choc ;
- déshydratation ;
- syndrome néphrotique ;
- cirrhose décompensée ;
- myélome ;
- traitements médicamenteux néphrotoxiques concomitants ;
- asthme connu ;
- antécédent de réaction anaphylactoïde aux produits de contraste iodés.
Le patient diabétique et le patient âgé ne constituent pas des sujets à risque particulier. Ils peuvent le devenir en cas de complications évolutives ou de pathologies associées. En dehors de la période néonatale où le risque semble lié à la quantité de produit de contraste injectée, l'enfant n'est pas un sujet à risque.
III - PRECAUTIONS GENERALES D'EMPLOI
Tous les produits de contraste iodés actuellement disponibles pour les examens tomodensitométriques et l'UIV, quelle que soit leur formule chimique, exposent aux mêmes types d'accidents et d'incidents.
C'est pourquoi l'injection d'un produit de contraste iodé par voie intraveineuse doit se faire sous la responsabilité d'un médecin, qui doit disposer des moyens techniques et des procédures pour traiter un éventuel accident.
IV - DECES ET ACCIDENTS MAJEURS
Concernant les décès et les accidents majeurs, les informations pertinentes accessibles au groupe d'experts et leur méta-analyse n'ont pas permis de démontrer de différence lors de l'utilisation par voie intraveineuse des différentes classes de produits de contraste iodés actuellement commercialisés.
Cependant, ces informations sont actuellement insuffisantes en qualité et en quantité pour conclure de façon définitive. En fonction des conceptions physiopathologiques actuelles, on peut admettre l'utilisation préférentielle des produits de contraste iodés de basse osmolalité, ioniques ou non ioniques, chez certains patients habituellement considérés comme à risque : insuffisance cardiaque sévère, insuffisance rénale ou toute situation à risque de dégradation de la fonction rénale. Elle peut être envisagée en cas d'asthme et d'antécédent de réaction anaphylactoïde aux produits de contraste iodés.
V - INCIDENTS MINEURS
Il a été établi que, comparativement aux produits de contraste iodés de haute osmolalité, les produits de basse osmolalité entraînaient moins d'incidents mineurs, c'est-à-dire moins d'effets secondaires ne nécessitant pas d'intervention thérapeutique.
Dans ces conditions, l'utilisation généralisée de produits de contraste iodés de basse osmolalité ne peut être recommandée que si l'objectif recherché est la diminution des incidents mineurs.
VI - PREVENTION DES ACCIDENTS
La prévention des accidents doit être mise en oeuvre quel que soit le produit de contraste iodé utilisé. Il faut systématiquement rechercher les facteurs de risque habituellement retenus et les supprimer lorsque cela est compatible avec les contraintes cliniques.
a - Réactions anaphylactoïdes
Le nombre limité d'informations pertinentes chez l'homme ne permet pas d'établir l'efficacité d'une prémédication systématique destinée à prévenir les réactions anaphylactoïdes. Les populations à risque justifiant une prémédication sélective ne sont pas correctement connues. Il n'y a pas d'accord unanime sur le type de prémédication à effectuer lorsqu'on décide d'en faire une.
Dans l'état actuel des connaissances, il n'est pas conseillé de réaliser un test à l'iode, car aucune étude n'a justifié sa valeur prédictive, et il peut être dangereux.
b - Néphrotoxicité
La déshydratation accentue les risques d'insuffisance rénale notamment chez les sujets à risque. Il faut que les patients soient correctement hydratés avant et après l'examen. Notamment, il n'est pas nécessaire d'imposer un jeûne supérieur à 6 heures. La suppression de tout traitement néphrotoxique doit être effectuée chaque fois que cela est possible. Il est conseillé de respecter autant que faire se peut un espacement d'environ cinq jours entre deux examens requérant l'utilisation de quantités importantes de produit de contraste iodé et d'employer les doses les plus faibles possible.
c - Tolérance cardiaque
Toute surcharge osmolaire représente un inconvénient chez les patients ayant une fonction cardiaque très altérée. Il faut donc minimiser cet apport en utilisant les doses les plus faibles possibles et le produit de contraste le plus faiblement osmolaire.
d - Interactions médicamenteuses
Dans le cas des traitements par bêtabloquants, il convient de peser le risque et le bénéfice de l'arrêt du médicament. Le risque de l'arrêt, assez bien documenté, est celui de la survenue d'accidents ischémiques coronariens chez certains patients difficiles à identifier au préalable. En cas de poursuite du traitement, le risque est théorique : il ne concernerait que l'efficacité des moyens de traitement des réactions anaphylactoïdes. Il ne paraît pas licite d'arrêter systématiquement les bêtabloquants avant une injection de produit de contraste iodé.
Chez les patients recevant de la metformine, biguanide exclusivement éliminé par le rein, une insuffisance rénale entraînée par l'administration d'un produit de contraste iodé risque de se compliquer d'hypoglycémie et surtout d'acidose lactique. C'est pourquoi il est recommandé d'arrêter la metformine 48 heures avant un examen non urgent. La reprise du traitement ou sa poursuite après l'examen est conditionnée par la vérification de l'absence d'insuffisance rénale.
Aucune médication ne doit être injectée dans la même seringue que le produit de contraste iodé.
e - Complications au site d'injection
Des précautions doivent être prises pour éviter l'extravasation du produit de contraste quel qu'il soit, notamment en cas d'utilisation d'un injecteur automatique.
VII - INSUFFISANCE DE LA RECHERCHE CLINIQUE DANS LE DOMAINE DES PRODUITS DE CONTRASTE IODES
La littérature épidémiologique et les essais cliniques, en particulier ceux comparant les mérites respectifs des produits de haute et de basse osmolalité, est qualitativement et quantitativement trop pauvre pour un problème de santé publique de cette importance. La méthodologie, les populations cibles, les types d'études réalisées ne permettent pas de répondre avec un degré suffisant de certitude aux questions que se posent légitimement les utilisateurs, les patients et les pouvoirs publics.
VIII - RESPONSABILITE JURIDIQUE
Les cas de condamnation sont rares en matière d'injection intraveineuse de produits de contraste iodés. L'appréciation du juge porte sur l'ensemble de la procédure, depuis l'indication de l'examen jusqu'au traitement de l'éventuelle complication.
L'injection de produits de contraste est un acte médical : c'est donc un véritable contrat entre le radiologue et le patient.
A ce titre, le médecin radiologue s'engage :
- à donner des soins conformes aux données actuelles de la science ;
- à informer le patient des conséquences normalement prévisibles de l'examen ;
- à s'informer des antécédents et à valider les indications qui motivent l'examen ;
- à disposer des moyens humains et techniques appropriés à l'acte et à ses suites.
IX - CONCLUSIONS
On peut minimiser les risques inhérents à l'utilisation d'un produit de contraste iodé par des mesures adéquates (telle que le maintien d'une bonne hydratation). Ces mesures demeurent les mêmes quel que soit le produit de contraste utilisé.
L'utilisation de produits de contraste iodés de basse osmolalité, ioniques et non ioniques, est concevable chez les sujets ayant certains facteurs de risque : insuffisance cardiaque sévère, insuffisance rénale ou toute situation à risque de dégradation de la fonction rénale, et peut-être asthme et antécédent de réaction anaphylactoïde aux produits de contraste iodés.
L'utilisation systématique des produits de contraste iodés de basse osmolalité, ioniques et non ioniques, dans la population générale ne peut être recommandée.
En raison des nombreuses inconnues concernant l'utilisation optimale de l'une ou l'autre classe de produits de contraste iodés, des recherches sont souhaitables selon une stratégie à définir sur la base des connaissances actuellement disponibles.
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