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Article paru sur le site NephroHUS
http://nephrohus.org le 15 octobre 1999
5.6 Acidoses et alcaloses respiratoires
(QI 126)15 octobre 1999
par
En condition normale, la PCO2 sanguine est maintenue à une valeur de 39 - 41 mmHg par la ventilation alvéolaire sous le contrôle des centres respiratoires dans la zone oblongue pontique et médullaire. Des modifications de la production de CO2 s’accompagnent d’altérations correspondantes de la ventilation alvéolaire aboutissant à peu ou pas de changement de la PCO2. La ventilation est régulée par les chémorécepteurs cérébraux pour la PCO2, la PO2 et le pH et par des impulsions neurales provenant des chémorécepteurs artériels et des mécanorécepteurs pulmonaires et enfin par des impulsions provenant du cortex cérébral. L’acidose ou l’alcalose respiratoire proviennent d’une altération primitive, augmentation ou diminution respectivement, de la PCO2 sanguine. Ces anomalies peuvent coexister avec d’autres désordres acide-base primitifs.
1. Hypercapnie aiguë
L’hypercapnie aiguë a de nombreuses causes comprenant notamment l’obstruction des voies aériennes, une dépression des centres respiratoires (d’origine médicamenteuse ou par lésions du tronc cérébral), une faiblesse neuro-musculaire (médicamenteuse, myasthénie, syndrome de Guillain et Barré), une maladie pulmonaire restrictive (pneumothorax, pneumopathie sévère), une ventilation mécanique inadéquate, et une altération circulatoire sévère.
Dans les minutes suivant une augmentation aiguë de la PCO2, il existe une augmentation modeste de la concentration plasmatique de bicarbonates liée largement au tamponnement intracellulaire des protons carbonate-acides et de la perte cellulaire de bicarbonates en échange de chlore. L’augmentation de la bicarbonatémie ne s’accompagne pas d’une bicarbonaturie indiquant une augmentation adaptée de la réabsorption de bicarbonates. L’hyperphosphatémie est une conséquence de l’hypercapnie aiguë. Les patients manifestent une anxiété, une polypnée et peuvent évoluer vers l’encéphalopathie avec myoclonie, convulsions en cas d’hypercapnie sévère. Le traitement doit être dirigé vers l’amélioration de la ventilation par ventilation mécanique si nécessaire et la correction de la cause sous-jacente.
2. L’hypercapnie chronique ou acidose respiratoire chronique
L’hypercapnie chronique peut être causée par de nombreuses maladies telles que les maladies pulmonaires chroniques obstructives, des anomalies des centres respiratoires (syndrome d’apnée du sommeil, obésité, hypoventilation), des désordres neuromusculaires (sclérose latérale amyotrophique), et des maladies restrictives pulmonaires (fibrose interstitielle, déformation thoracique).
La PCO2 du liquide céphalorachidien se modifie rapidement pour égaler la PCO2 artérielle sanguine. L’hypercapnie qui persiste pendant plusieurs heures induit une augmentation de la concentration en bicarbonates du liquide céphalorachidien qui atteint un maximum vers 24 heures et restaure partiellement le pH du LCR. Une hypercapnie prolongée stimule également la sécrétion nette rénale d’acide, augmentant la concentration sanguine de bicarbonates jusqu’à un nouvel état d’équilibre atteint après 3 à 5 jours.
La prudence est de mise pour réduire la PCO2 chez ces patients. Une correction brutale de l’hypercapnie (par ventilation mécanique par exemple) alcalinise le liquide céphalorachidien, ce qui peut causer des convulsions et induire une alcalose métabolique systémique aiguë pouvant persister plusieurs jours.
3. Hypocapnie aiguë
Les principales causes d’hypocapnie aiguë sont l’hypoxie, l’anxiété, la douleur, le sepsis, l’insuffisance hépatique, les désordres neurologiques centraux (accident vasculaire cérébral, infection), les maladies pulmonaires (infections et maladies interstitielles pulmonaires), les médicaments (intoxication aux salicylés) et la grossesse.
Une réduction aiguë de la PCO2 produit une diminution de faible intensité mais immédiate de la bicarbonatémie liée à la captation cellulaire de bicarbonates en échange de chlore. L’hypocapnie aiguë augmente également la captation cellulaire de potassium et de phosphate dont les concentrations plasmatiques s’abaissent et enfin augmente la liaison du calcium ionisé à l’albumine sérique. Les patients avec une hypocapnie aiguë peuvent développer des arythmies cardiaques, une vasoconstriction cérébrale, des paresthésies faciales et périphériques, des crampes musculaires, une syncope ou des convulsions. Le traitement doit être orienté vers la diminution de l’hyperventilation par la sédation si nécessaire et la correction de la cause sous-jacente.
4. Hypocapnie chronique
Plusieurs situations telles que l’hypoxie de haute altitude, l’insuffisance hépatique chronique, les maladies pulmonaires chroniques, les traumatismes du système nerveux central, et la grossesse peuvent produire une alcalose respiratoire chronique.
L’hypocapnie prolongée induit une réduction correspondante de la PCO2 du LCR et une chute de la concentration en bicarbonates du LCR corrigeant le pH en l’abaissant. En l’espace de quelques minutes à quelques heures d’hypocapnie prolongée, il y a une inhibition de la réabsorption tubulaire proximale de bicarbonates, et une bicarbonaturie. Un nouvel état d’équilibre est atteint en 2 à 3 jours avec une diminution de la concentration plasmatique de bicarbonates. Cette concentration plasmatique de bicarbonates peut nécessiter plusieurs jours pour revenir à la normale après correction de l’hypocapnie chronique résultant transitoirement en une acidose métabolique hyperchlorémique.