AccueilPages Med.MedlineCalculsRecommand.Liens

Diagnostic des HTA secondaires
OBJECTIFS
  • Evoquer l'hypercalcémie devant de nombreuses manifestations peu spécifiques
  • Etablir le diagnostic étiologique, hyperparathyroidie et cancers en particulier

 
NephroHUS Online PLAN DU CHAPITRE

L'hypercalcémie résulte d'un grand nombre de maladies, les plus fréquentes étant l'hyperparathyroïdie primitive ou les cancers.

Symptomes de lhypercalcémie

Les symptomes et signes associés avec l'hypercalcémie peuvent être liés à l'élévation de la concentration sérique de calcium ou à la maladie sous-jacente. Les symptomes liés à l'hypercalcémie proprement dites ont été surtout identifiés dans l'hyperpathyroïdie primitive, une maladie potentiellement réversible. L'hypercalcémie peut toucher un grand nombre d'organes mais la plupart des symptomes sont relativement non spécifiques. L'intensité de ces symptomes dépend à la fois du degré d'hypercalcémie et de la vitesse d'installation de celle-ci.

Au plan gastro-intestinal, la constipation est la plus fréquente et associée à une diminution de la motilité intestinale. L'hypercalcémie stimule la sécrétion de gastrine ce qui pourrait favoriser les ulcères gastriques (15 à 20 %) au cours de l'hyperparathyroïdie primitive. La pancréatite aigüe est associée à une hypercalcémie sévère.

Les signes neuro-musculaires comportent une faiblesse musculaire, des crises de pseudo-goutte en rapport avec une chondrocalcinose.

voir la figure Chondrocalcinose radiologique traduisant une hypercalcémie chronique (hyperparathyroidie primitive)

Une kératopathie en bandes peut être observée à la lampe à fente et reflète des dépôts sous-épithéliaux de phosphate de calcium dans la cornée.

Les troubles neurologiques associent anxiété, dépression et anomalie de la fonction cognitive. Des perturbations plus sévères sont observées lorsque l'hypercalcémie est très importante en particulier chez les sujets âgés : confusion, psychose organique, hallucination, somnolence voire coma (la calcémie est alors généralement supérieure à 4 mmol/l ou 160 mg/l).

L'hypercalcémie prolongée peut aboutir au dépôt de calcium dans les valves cardiaques, les artères coronaires et les fibres myocardiques. L'hypercalcémie diminue directement le potentiel d'action des fibres myocardiques ce qui se traduit par un intervalle QT raccourci.

voir la figure "Raccourcissement de l'intervalle QT au cours d'une hypercalcémie".

Au niveau du rein, les manifestations les plus importantes de l'hypercalcémie sont la lithiase rénale, l'insuffisance rénale chronique ou aigüe et la dysfonction tubulaire.
  1. Lithiase rénale : La lithiase rénale survient essentiellement chez les patients ayant une hypercalcémie chronique. L'association d'une lithiase calcique et d'une hypercalcémie est pratiquement toujours liée à une hyperparathyroïdie primitive (le principal diagnostic différentiel est la sarcoïdose qui est également fréquemment responsable d'hypercalciurie et qui peut plus rarement se compliquer de lithiases rénales calciques). La lithiase rénale est observée jusque dans 20 % des patients avec hyperparathyroïdie et inversement 5 % des patients lithiasiques auraient une hyperparathyroïdie primitive. Chez les patients avec une lithiase sans hypercalcémie franche, l'hyperparathyroïdie primitive doit être suspectée tout particulièrement chez les femmes lorsque les concentrations de calcium sont normales hautes et associées à une hypercalciurie (hyperparathyroïdie dite normocalcémique). L'hypercalciurie secondaire à l'hypercalcémie est le facteur causal principal de la formation des calculs au cours de l'hypercalcémie chronique.

  2. Diabète insipide néphrogénique : L'hypercalcémie chronique entraine un défaut de la capacité de concentration des urines qui entraine une polyurie, une polydipsie jusque dans 20% des cas. Le mécanisme en est complexe mais fait en partie intervenir les dépôts de calcium dans la médullaire (néphrocalcinose).

  3. Acidose tubulaire rénale : L'hypercalcémie chronique cause de façon peu fréquente une acidose tubulaire distale (type 1). L'hypercalciurie et l'hypocitraturie associées contribuent au développement des lithiase rénales et de la néphrocalcinose.
    voir la figure Néphrocalcinose en macroscopie rénale
    voir la figure Néphrocalcinose microscopique
    voir la figure Néphrocalcinose microscopique : les dépots de calcium sont bien mis en évidence par la coloration de Von Kossa.
  4. Insuffisance rénale : Le développement d'une insuffisance rénale au cours de l'hyperparathyroïdie primitive est lié au degré, à la durée de l'hypercalcémie. Une concentration sérique de calcium de 3 à 3.75 mmol/l (120 à 150 mg/l) entrainent une diminution réversible de la filtration glomérulaire médiée par une vasoconstriction rénale directe et une contraction volémique liée à la perte obligatoire de sodium. Une hypercalcémie et une hypercalciurie prolongée aboutissent au développement d'une néphropathie chronique hypercalcémique qui peut être irréversible et continuer à progresser malgré la correction de l'hyperparathyroïdie. Calcification, dégénération et nécrose des cellules tubulaires aboutissent finalement à l'atrophie tubulaire et à la fibrose interstitielle ainsi qu'à la néphrocalcinose. Ces anomalies sont plus marquées au niveau de la médullaire rénale mais sont également observées dans le cortex. La néphrocalcinose peut être détectée par des radiographies mais l'échographie et le scanner sont des moyens beaucoup plus sensibles pour le diagnostic précoce. La néphropathie chronique hypercalcémique se présente cliniquement comme une néphropathie interstitielle avec polyurie, perte de sel, hypertension. L'hypertension, la lithiase, l'obstruction et l'infection secondaires éventuelles peuvent toutes contribuées à une aggravation de la fonction rénale. Le diagnostic est généralement évoqué devant l'association d'une insuffisance rénale avec calcémie élevée. Cependant, lorsque l'insuffisance rénale est avancée, l'association d'une hyperphosphatémie et d'une diminution de la concentration de calcitriol peut normaliser la concentration de calcium.

  5. L'hypertension artérielle est fréquente chez les patients avec hypercalcémie. Deux facteurs sont probablement d'importance essentielle : l'insuffisance rénale et la vasoconstriction induite par le calcium. L'hypertension n'est pas toujours corrigée par la cure chirurgicale de l'hyperparathyroïdie.


Approche diagnostique des hypercalcémies :

Il y a plus de 25 maladies différentes susceptibles de donner une hypercalcémie, cependant l'hyperparathyroïdie primitive et les cancers représentent ensemble 80 à 90 % des cas. Il est tout à fait inhabituel qu'une hypercalcémie révèle un cancer et il est rare qu'un cancer ne soit pas cliniquement apparent lorsque l'hypercalcémie est découverte pour la première fois. Ainsi, une hypercalcémie chez un patient ambulatoire en bonne santé apparente est habituellement liée à une hyperparathyroïdie primitive alors que les cancers sont plus souvent responsables des hypercalcémies observées chez les patients hospitalisés. A noter cependant que le syndrome dit des "buveurs de lait et d'alcalins" est une cause devenant de plus en plus fréquentes d'hypercalcémie en raison de l'utilisation large du carbonate de calcium pour traiter l'ostéoporose, les dyspepsies et l'hyperphosphatémie de l'insuffisance rénale chronique. L'importance de l'hypercalcémie est également utile au diagnostic. L'hyperparathyroïdie primitive est souvent associée à une hypercalcémie limite ou modérée avec des concentrations de calcium plasmatique en-dessous de 2.75 mmol/l (110 mg/l). Des valeurs supérieures à 3.25 mmol/l (130 mg/l) sont inhabituelles au cours de l'hyperparathyroïdie primitive et en l'absence d'autre cause apparente sont plus souvent liées à des cancers.

Pour toutes ces raisons, la cause de l'hypercalcémie peut souvent être établie cliniquement. L'histoire et l'examen cliniques ainsi que la radiographie thoracique (à la recherche d'une sarcoïdose ou d'un cancer) et les données biologiques (électrophorèse des protides sériques à la recherche d'un myélome) permettent d'aboutir à un diagnostic correct dans 95 % des cas. Le dosage de la parathormone intacte immunoréactive (iPTH) augmente cette précision jusqu'à 99 %.

Etape N° 1 : Données cliniques et anamnéstiques :

Les arguments cliniques en faveur de l'hyperparathyroïdie primitive comportent l'absence d'autre cause évidente d'hypercalcémie, une histoire familiale d'hyperparathyroïdie ou de néoplasie endocrine multiple, une histoire d'irradiation du cou ou de la tête dans l'enfance, la ménopause chez une femme, une histoire d'ulcère gastrique ou de pancréatite, un examen physique normal et la notion d'une hypercalcémie prolongée chez un patient asymptomatique. Le dosage de la concentration plasmatique en phosphate peut être utile. L'hyperparathyroïdie et l'hypercalcémie maligne humorale liée à un excès de PTH related protein (PTHrp, cf infra) se présentent souvent avec une hypophosphatémie traduisant l'inhibition de la réabsorption proximale de phosphates. Par contre, la phosphatémie est normale ou élevée au cours des granulomatoses, des intoxications par la vitamine D, de l'immobilisation, de la thyrotoxicose, du syndrome lait et alcalin et des métastases osseuses.

L'excrétion urinaire de calcium est également variable selon la cause de l'hypercalcémie. Trois situations d'hypercalcémie sont associées à une augmentation de la réabsorption de calcium aboutissant à une hypocalciurie relative (moins de 2,5 mmol/jour soit 100 mg/jour) : le syndrome lait-alcalin, les diurétiques thiazidiques et llhypercalcémie familiale hypocalciurique.

Une concentration du chlore plasmatique au-delà de 103 mmol/l généralement associée à une légère diminution de la bicarbonatémie est en faveur de l'hyperparathyroïdie primitive alors qu'une concentration plus basse en chlore et une alcalose métabolique sont caractéristiques du syndrome lait-alcalin. La mise en évidence d'une ostéïte fibreuse sur les radiographies du squelette est très spécifique de l'hyperparathyroïdie mais n'est retrouvée que dans 5 % des cas environ.

Etape N° 2 : Analyse du taux de PTH et de PTHrp

L'augmentation du taux de iPTH indique l'hyperparathyroïdie primitive ou la prise de lithium. Un taux normal est également virtuellement diagnostique de l'hyperparathyroïdie primitive dans la mesure où cette valeur est inappropriée compte-tenu de la présence de l'hypercalcémie. Un taux d'iPTH abaissé ou normal bas est en faveur de toutes les autres causes d'hypercalcémie non induites par la PTH. L'hypercalcémie maligne humorale est la plus fréquente notamment lorsqu'il existe des éléments cliniques de cancer habituellement une tumeur solide et si l'hypercalcémie est d'installation relativement récente. Les patients dans cette situation ont habituellement une maladie avancée, un pronostic très sombre.
Le diagnostic d'hypercalcémie humorale maligne est confirmée par la démonstration d'un taux élevé de PTHrp qui est le médiateur principal de l'hypercalcémie dans la plupart des cas. La production de calcitriol ainsi que celle de PTH est habituellement supprimée de façon appropriée chez ces patients. La PTHrp est une protéine produite par certaines tumeurs qui agit en activant le récepteur de la PTH. Cette protéine est immunologiquement distincte de la PTH et sa concentration est virtuellement indétectable ou très abaissée chez tous les sujets normaux et les patients hypercalcémiques par hyperparathyroïdie primitive. La PTHrp est élevée chez la majorité des patients ayant une hypercalcémie maligne humorale liée notamment aux tumeurs solides.
Dans une étude de 49 patients avec une hypercalcémie liée à un cancer, 88 % avaient une augmentation de la PTHrp. La plupart des patients avec un taux normal avaient soit des métastases osseuses diffuses, soit une hématopathie comme un myélome, situations au cours desquelles l'hypercalcémie peut être liée à d'autres facteurs que la PTHrp.

Etape N° 3 : Analyse des concentrations des métabolites de la vitamine D

Les concentrations plasmatiques des métabolites de la vitamine D, calcidiol et calcitriol doivent être mesurées lorsqu'il n'y a pas de cause néoplasique évidente et lorsque ni la PTH, ni la PTHrp ne sont augmentées.
Une concentration élevée de calcidiol suggère une intoxication par la vitamine D, soit vitamine D, soit calcidiol lui même. D'autre part, une augmentation de la concentration de calcitriol peut être liée soit à une absorption directe de ce composé, soit une production extra-rénale comme dans les granulomatoses ou les lymphomes ou encore liée à une augmentation de production rénale induite par une hyperparathyroïdie primitive mais pas par la PTHrp.

Les patients avec une granulomatose ou un lymphome ont généralement une atteinte pulmonaire et extra-pulmonaire diffuse. En l'absence d'une telle atteinte et lorsqu'il n'y a pas d'autre cause évidente d'augmentation du calcitriol, une recherche systématique doit être effectuée pour mettre en évidence des granulomes pulmonaires occultes rénaux, hépatiques, oculaires ou médullaires. Dans ce contexte, un test de suppression à l'hydrocortisone peut être éventuellement utile : 40 mg d'hydrocortisone sont administrés oralement toutes les 8 heures pendant 10 jours et la concentration plasmatique de calcium et de calcitriol sont évaluées régulièrement. L'hypercalcémie liée à un excès de production de calcitriol est habituellement rapidement résolutive avec ce test thérapeutique.

La combinaison à la fois d'un taux abaissé de PTH et des métabolites de la vitamine D suggère d'autres sources de l'hypercalcémie. En l'absence de cancer et d'une PTHrp augmentée, une stimulation de la résorption osseuse comme au cours des thyrotoxicoses, de l'immobilisation prolongée, de la maladie de Paget, et enfin une absorption méconnue de calcium particulièrement chez un insuffisant rénal sont les causes les plus vraisemblables.

Etiologie des hypercalcémies :

L'hypercalcémie est une anomalie relativement fréquente liée dans pratiquement tous les cas à une élévation de la concentration du calcium ionisé, la fraction libre active et physiologique. Environ 40 à 45 % du calcium circulant est lié aux protéines principalement l'albumine et toute augmentation de la capacité protéique de liaison cause une élévation de la concentration totale de calcium plasmatique sans élévation du calcium ionisé. Une telle situation résulte de l'hyperalbuminémie en cas de déshydratation sévère et de rares cas de myélomes au cours desquels la protéine monoclonale a des capacités de liaison du calcium. Ce phénomène est appelé pseudo-hypercalcémie ou hypercalcémie factice.
Une véritable hypercalcémie est une situation au cours de laquelle les entrées de calcium dans la circulation dépasse l'excrétion rénale du calcium. Les principales sources de calcium sont l'os (résorption) et l'intestin (absorption). Il est classique de diviser les causes d'hypercalcémie en fonction du mécanisme prédominant, diminution de l'excrétion rénale, augmentation de la résorption osseuse, augmentation de l'absorption intestinale mais il faut savoir que dans un grand nombre de cas, plusieurs mécanismes peuvent être asociés.

1) Hypercalcémies absorptives :

Il est tout à fait inhabituel qu'une hypercalcémie résulte d'une augmentation de l'apport en calcium car l'élévation initiale de la concentration plasmatique de calcium supprime à la fois la libération de PTH et la synthèse de calcitriol. Cependant, lorsque les apports augmentés sont associés à une diminution de l'excrétion urinaire de calcium, une hypercalcémie peut survenir notamment dans deux situations, l'insuffisance rénale chronique et le syndrome lait-alcalin. Au cours de l'insuffisance rénale, une hypercalcémie peut survenir chez les patients traités par carbonate ou acétate de calcium, produits administrés pour diminuer la concentration plasmatique de phosphates en diminuant leur absorption digestive et ceci tout particulièrement lorsque les patients sont traités aussi par calcitriol pour prévenir l'hypocalcémie et l'hyperparathyroïdie secondaire. Le syndrome lait-alcalin en l'absence d'insuffisance rénale peut induire une hypercalcémie liée à l'absorption de lait ou de carbonate de calcium, l'hypercalcémie est alors associée à une alcalose métabolique et à une insuffisance rénale fonctionnelle. L'alcalose métabolique pérennise l'hypercalcémie en stimulant directement la réabsorption de calcium dans le tubule distal. Des lésions rénales définitives peuvent être observées si la calcémie augmente de façon prolongée.

L'augmentation des métabolites actifs de la vitamine D (calcidiol ou calcitriol) peut entrainer une hypercalcémie absorptive. Cette situation se rencontre après ingestion de hautes doses, soit de vitamine D convertie en calcidiol dans le foie ou de calcidiol lui même ou encore après l'administration percutanée de calcipotriol, un analogue de la vitamine D utilisé dans le traitement de certaines maladies dermatologiques. L'intoxication par le calcitriol est habituellement liée à l'absorption de ce composé comme au cours du traitement de l'hypoparathyroïdie ou pour le traitement de l'hypocalcémie hyperparathyroïdie de l'insuffisance rénale. L'hypercalcémie liée à l'ingestion de calcitriol est habituellement de courte durée en raison d'une demi-vie biologique courte, l'hypercalcémie est plus prolongée avec les autres formes de vitamine D orales d'action longue.

Une hyperproduction endogène de calcitriol peut survenir au cours des granulomatoses chroniques comme la sarcoïdose, au cours des lymphomes malins et chez certains patients avec acromégalie.

Hypercalcémie des granulomatoses :

L'hypercalcémie peut être observée au cours de la plupart des granulomatoses. La sarcoïdose est probablement la plus fréquente mais l'hypercalcémie peut également survenir au cours de la tuberculose, de la bérylliose, de la coccidiodomycose, de lhistoplasmose, de la candidiase, de lhistiocytose des cellules de Langerhans (également appelée histiocytose X), des granulomes induits par le silicone ainsi que la maladie de Hodgkin et certains lymphomes non Hodgkiniens.
La plupart des patients avec une hypercalcémie au cours d'une granulomatose sont asymptomatiques. Cependant des signes d'hypercalcémie chronique comme une lithiase urinaire, une néphrocalcinose, une insuffisance rénale et une polyurie peuvent également survenir.

Au cours de la sarcoïdose, environ 50 % des patients ont une hypercalciurie et 15 à 20 % une hypercalcémie. Ces anomalies sont liées à une augmentation de l'absorption intestinale du calcium sous l'influence d'une augmentation de la concentration circulante du calcitriol. Ce calcitriol provient d'une production extra-rénale de calcitriol depuis les cellules mononucléées des granulomes principalement du poumon et des ganglions. Des anomalies plus frustres du métabolisme du calcitriol peuvent être mises en évidence chez la plupart des patients ayant une sarcoïdose active même en l'absence d'hypercalciurie ou d'hypercalcémie franche.

Les anomalies identiques (hypercalcémie, hypercalcitriolémie) sont mises en évidence au cours d'autres granulomatoses comme par exemple la tuberculose active.

Au cours des lymphomes Hodgkiniens, une augmentation de la production de calcitriol est responsable de pratiquement tous les cas d'hypercalcémie. Des anomalies identiques peuvent être observées chez environ 1/3 à la moitié des patients ayant des lymphomes non Hodgkiniens cependant dans ce contexte, l'hypercalcémie peut également être liée à une hypersécrétion de PTHrp. Des anomalies de la production du calcitriol sont probablement très fréquentes au cours des lymphomes car la plupart des patients même normocalcémiques ont une hypercalciurie et un grand nombre ont une calcitriolémie élevée. La survenue d'une hypercalcémie dans ce contexte dépend probablement de facteurs environnementaux (exposition au soleil, apport en vitamine D).

2) Hypercalcémies résorptives :

L'activation des ostéoclastes entrainant l'augmentation de résorption osseuse est suffisante pour induire une hypercalcémie observée dans un grand nombre de circonstances. Cependant, l'hyperparathyroïdie primitive et les cancers sont habituellement les deux causes principales d'hypercalcémie, les cancers représentant la principale cause d'hypercalcémie sévère (concentration de calcium supérieure à 3,5 mmol/l ou 140 mg/l).

Hyperparathyroidie primitive
L'hyperparathyroïdie primitive est le plus souvent liée à un adénome parathyroïdien et la plupart des patients atteints se présentent avec une élévation limite de la calcémie (généralement inférieure à 2.75 mmol/l soit 110 mg/l). L'hyperparathyroïdie secondaire de l'insuffisance rénale chronique est habituellement caractérisée par une hypocalcémie et une hyperphosphatémie. L'hypercalcémie peut parfois survenir chez les patients traités par carbonate de calcium et calcitriol. Chez certains patients ayant une insuffisance rénale chronique avancée et prolongée, une hypercalcémie peut survenir à la suite d'une hyperparathyroïdie tertiaire c'est à dire de la progression d'une hyperplasie parathyroïdienne appropriée vers une hyperproduction autonome et non régulée de PTH par un adénome.

voir la figure Adénome parathyroidien

Hypercalcémie des néoplasies :
L'hypercalcémie est une complication relativement fréquente des cancers survenant dans 10 à 20 % des cas. L'hypercalcémie est observée à la fois au cours des tumeurs solides et des cancers hématologiques. Les cancers les plus fréquemment associés à l'hypercalcémie sont les cancers du sein et du poumon et le myélome. L'hypercalcémie des cancers est liée à une augmentation de la résorption osseuse et au relargage du calcium à partir de l'os. Il y a deux mécanismes principaux par lesquels les cancers augmentent la résorption osseuse : métastases ostéolytiques et libération locale de cytokines comme le TNF et l'interleukine 1; et augmentation de la sécrétion tumorale de PTHrp.

  • Métastases ostéolytiques :
    L'ostéolyse locale par des lymphokines libérées par les cellules tumorales est souvent observée au cours des tumeurs qui sont métastatiques à l'os. Le TNF et l'interleukine 1 et probablement l'interleukine 6 jouent un rôle important dans l'activation des ostéoclastes. Des macrophages infiltrant la tumeur et non pas les cellules tumorales par elles-mêmes semblent être la source des cellules qui se différencient en ostéoclastes. Une cytokine proche, la lymphotoxine est le principal facteur favorisant la résorption osseuse produit au cours du myélome.
    voir la figure Radio de crane de profil au cours d'un myélome montrant les lésions géodiques caractéristiques "à l'emporte-pièce".
    Certains arguments suggèrent également que la PTHrp produite localement pourrait contribuer à l'ostéolyse dans certaines tumeurs (cancer du sein).

  • Hypercalcémie humorale maligne
    La cause la plus fréquente d'hypercalcémie associée aux tumeurs solides non métastatiques est la libération de "PTH related protein" (PTHrp), situation appelée hypercalcémie humorale maligne. La PTHrp est une protéine ayant une homologie structurale avec la PTH notamment sur la partie amino-terminale où les 13 premiers amino-acides sont presque identiques. Cette homologie permet à la PTHrp de stimuler les récepteurs de la PTH et donc de simuler la plupart des actions de la PTH y compris l'augmentation de la résorption osseuse, la réabsorption distale du calcium et l'inhibition de la réabsorption proximale de phosphates. La PTHrp stimule cependant moins la production de calcitriol que la PTH. La divergence structurale du reste de la molécule permet une détection immunologique spécifique.

    L'hypercalcémie humorale maligne doit être suspectée chez tout patient ayant une hypercalcémie et une tumeur solide en l'absence de métastase osseuse évidente. L'hypercalcémie néoplasique induite par la PTHrp traduit habituellement un cancer évolué et un pronostic très sombre à court terme. L'augmentation de PTHrp est responsable d'environ 90 % des hypercalcémies survenant dans un contexte de néoplasie. L'hypercalcémie induite par la PTHrp est généralement observée au cours des tumeurs solides et au cours de certains lymphomes non Hodgkiniens particulièrement d'origine cellulaire B. Des augmentations plus modérées de la PTHrp peuvent également être observées chez des patients ayant des cancers mais qui sont encore normo-calcémiques. Outre sa valeur dans le diagnostic d'une hypercalcémie, la PTHrp est également un marqueur tumoral permettant d'apprécier la réponse au traitement ainsi que la réponse hypocalcémique au pamidronate (voir traitement). La PTHrp semble avoir également une importance pronostique puique les patients ayant les taux les plus élevés de PTHrp ont également une médiane de survie la plus courte.


3) Causes diverses et inhabituelles :

D'autres causes moins fréquentes d'hypercalcémie résorptive sont : l'immobilisation, la maladie de Paget, l'administration d'estrogènes ou d'anti-estrogènes (Tamoxifène) chez les patientes ayant un cancer du sein et des métastases diffuses, l'hypervitaminose A ou l'administration d'acide rétinoïque chez des patients ayant certains cancers. Dans ce dernier cas, l'hypercalcémie est dose-dépendante et survient dans environ 30 % des cas. L'acide rétinoïque inhibe la croissance cellulaire en partie en down- régulant les récepteurs de l'interleukine 6. L'élévation résultante de l'IL6 plasmatique serait responsable de l'augmentation de résorption osseuse et de l'hypercalcémie.

Environ 50 % recevant un traitement chronique par le lithium développent une hypercalcémie modérée attribuée à l'augmentation de la sécrétion de parathormone .
Les diurétiques thiazidiques diminuent l'excrétion urinaire de calcium, une propriété qui est utilisée pour le traitement des lithiases urinaires récidivantes liées à une hypercalciurie. Les diurétiques thiazidiques peuvent augmenter la concentration plasmatique de calcium chez les patients ayant une maladie sous-jacente favorisant la résorption osseuse comme une hyperparathyroïdie primitive ou l'administration de vitamine D.
Une intoxication par la théophylline peut être associée à une hypercalcémie modérée.

Une hypercalcémie modérée survient chez 15 à 20 % des patients avec hyperthyroïdie. L'hypercalcémie peut alors être corrigée par un béta-bloqueur. Cependant, l'hyperthyroïdie est associée à une incidence augmentée d'adénome parathyroïdien.
Le phéochromocytome est une cause rare d'hypercalcémie, celle-ci étant le plus souvent liée à une hyperparathyroïdie associée (néoplasie endocrinienne multiple de type II) ou à la synthèse exagérée de PTHrp par le phéochromocytome lui même.
Une hypercalcémie peut compliquer une insuffisance surrénale à l'occasion d'une crise aigüe. L'hypercalcémie est liée à plusieurs facteurs : augmentation de la résorption osseuse, contractions volémiques, réabsorption proximale tubulaire de calcium et hémoconcentration.

Une hypercalcémie est parfois observée pendant la phase de reprise de diurèse après une insuffisance rénale aigüe, le plus souvent chez des patients avec une rhabdomyolyse. Le mécanisme présumé est la mobilisation du calcium qui a été déposé auparavant dans les muscles lésés. La correction de l'hyperphosphatémie par l'amélioration de la fonction rénale, l'hyperparathyroïdie secondaire et une augmentation du calcitriol plasmatique sont des facteurs favorisant l'hypercalcémie dans ce contexte.

L'hypercalcémie familiale hypocalciurique est une maladie génétique rare transmise selon un mode autosomique dominant et caractérisée par une hypercalcémie modérée, une hypocalciurie, une magnésémie normale ou modérément élevée et une concentration de parathormone circulante normale ou légèrement augmentée. La plupart des patients n'ont pas ou peu de symptomes d'hypercalcémie et ne nécessitent aucun traitement. La parathyroïdectomie sub-totale dans cette affection ne corrige pas l'hypercalcémie. L'anomalie primitive de cette maladie est une mutation inactivatrice du gène codant pour le récepteur sensible au calcium présent normalement dans les cellules parathyroïdiennes et le rein. La mutation aboutit à une diminution du nombre de récepteurs fonctionnels à la surface des cellules parathyroïdiennes et rénales et donc une concentration de calcium plus élevée pour pouvoir supprimer la libération de PTH. Le diagnostic doit être évoqué dans un contexte d'hypercalcémie familiale généralement asymptomatique, l'absence de complication de l'hypercalcémie chronique notamment lithiase urinaire, néphrocalcinose ou ostéïte fibreuse et surtout l'existence d'une hypocalciurie inférieure à 200 mg/jour avec une fraction d'excrétion du calcium inférieure à 0.01 chez la plupart des patients.

La chondrodysplasie métaphysaire, une forme rare de nanisme est associée à une hypercalcémie asymptomatique et une hypophosphatémie. Cette affection est liée à une mutation du gène du récepteur de la PTH rp aboutissant en une activation continue du récepteur pour des concentrations normales ou réduites de PTH.

Le déficit congénital en lactase chez lenfant est caractérisé par une hypercalcémie et une. L'hypercalcémie est rapidement résolutive avec l'institution d'un régime dépourvu en lactose mais la néphrocalcinose peut persister. La présence de lactose non hydrolysée dans l'intestin semble favoriser l'absorption intestinale iléale du calcium.

Pr T. Hannedouche


LECTURES RECOMMANDÉES

  Bushinsky DA & Monk RD. Calcium. Lancet 1998;352:306

TEXTES COMPLÉMENTAIRES DANS LE SITE

  • Hypercalcémies
  • Hyperparathyroidie primitive,
  • Traitement des hypercalcémies,
  • Hypocalcémies,
  • Traitement des hypocalcémies,
  • Formes cliniques des lithiases urinaires,
  • Evaluation de la lithiase urinaire,
  • Traitement médical de la lithiase calcique primitive,
  • Régulation de la phosphorémie
  • Hyperphosphatémies
  • Hypophosphatémies
  • Rachitismes hypophosphatémiques héréditaires
  • Régulation de la magnésémie
  • Hypermagnésémies
  • Hypomagnésémies

Mise-à-jour  Jeu 28 juin 2001

Copyright © Tous Droits Réservés pour le site entier Nephrohus 2001