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OBJECTIFS
  • Savoir définir l'hyponatrémie et connaître les principales complications associées

  • Connaître la démarche diagnostique devant une hyponatrémie

  • Connaître les principales causes d'hyponatrémie et leurs caractéristiques diagnostiques

 
NephroHUS Online PLAN DU CHAPITRE

Généralités

L'hyponatrémie est définie par une diminution de la concentration plasmatique de sodium en dessous de 136 mmol/l associée à une diminution de losmolalité plasmatique (hypotonicité extracellulaire).
Chez pratiquement tous les patients l'hyponatrémie reflète une rétention d'eau liée à l'incapacité du rein à excréter l'eau ingérée. Dans la plupart des cas, ces défauts représentent une sécrétion persistante d'hormone antidiurétique.

Symptomatologie des hyponatrémies

Les symptômes observés au cours de l'hyponatrémie sont essentiellement neurologiques et sont liés à la fois à la sévérité et à la rapidité des modifications de la natrémie. Il faut également signaler que ces patients peuvent manifester des signes liés à une déplétion volémique associée ou à une maladie neurologique sous-jacente qui prédispose aux anomalies électrolytiques en particulier qui peut favoriser la sécrétion inappropriée d'hormone antidiurétique, la rétention d'eau et l'hyponatrémie.

Les symptômes directement attribuables à l'hyponatrémie surviennent essentiellement lors de réduction aiguë et/ou marquée de la natrémie et reflète une dysfonction neurologique induite par l'oedème cérébral. Dans cette circonstance, la chute associée de l'osmolalité plasmatique crée un gradient osmolaire favorisant l'entrée d'eau dans les cellules. La présence d'une hyperhydratation cérébrale corrèle généralement d'assez près avec la sévérité des symptômes. Les nausées, la sensation de malaise sont les signes les plus précoces qui peuvent être observés lorsque la natrémie s'abaisse entre 125 et 130 mmol/l. Ceci peut être suivi par des céphalées, une léthargie, des troubles de la vigilance et éventuellement une comitialité, un coma et un arrêt respiratoire lorsque la natrémie descend en-dessous de 115 à 120 mmol/l.

voir la figure L'oedème aigu cérébral dans une boîte cranienne inextensible est une situation grave. L'oedème de l'hémisphère cérabral gauche a produit un déplacement et une hernie de l'hippocampe à travers la tente.
voir la figure La surface du cerveau au cours de l'oedème cérébral présente des convolutions applaties par l'oedème.

L'encéphalopathie hyponatrémique peut être réversible mais des lésions neurologiques permanentes ou la mort peuvent survenir ce risque sembalnt plus important chez les femmes préménopausées. Une correction trop rapide de la natrémie peut être également délétère, ceci plus spécialement chez les patients avec une hyponatrémie chronique et asymptomatique.

L'oedème cérébral induit par l'hyponatrémie survient essentiellement à l'occasion de réduction rapide de la natrémie sur 1 à 3 jours, comme cela est souvent observé chez les patients en situation post-opératoire recevant de grandes quantités de fluides hypotoniques et chez les patients traités par diurétiques thiazidiques. Des lésions cérébrales hypoxiques peuvent également contribuer au déficit neurologique si un arrêt respiratoire est survenu.

Evaluation des hyponatrémies

Chez pratiquement tous les patients l'hyponatrémie reflète une rétention d'eau liée à l'incapacité à excréter l'eau ingérée. Dans la plupart des cas, l'anomalie en cause est une une sécrétion persistante d'hormone antidiurétique. L'excrétion de leau libre peut également être limitée par une insuffisance rénale avancée, indépendamment de l'ADH.

En l'absence d'insuffisance rénale, le diagnostic différentiel fait appel à l'anamnèse, à l'examen clinique, à la recherche d'une des causes d'excès de sécrétion d'ADH : hypovolémie vraie (comprenant notamment des pertes rénales ou gastrointestinales), diminution du volume circulant effectif (insuffisance cardiaque congestive, cirrhose hépatique), syndrome de sécrétion inappropriée d'ADH, insuffisance surrénale ou hypothyroïdie.

Trois examens biologiques apportent des informations importantes au diagnostic étiologique d'une hyponatrémie : l'osmolalité plasmatique, l'osmolalité urinaire et enfin la concentration urinaire en sodium.

    Osmolalité plasmatique :

L'osmolalité plasmatique est réduite chez la plupart des patients hyponatrémiques dans la mesure où l'osmolalité est principalement déterminée par la concentration plasmatique de sodium.
Dans certains cas cependant, l'osmolalité plasmatique peut être soit normale, soit élevée. L'osmolalité peut être normale en cas d'hyperlipidémie ou d'hyperprotéinémie ou encore de l'absorption de glycine isotonique pendant une résection transuréthrale de la vessie ou de la prostate.
Une hyponatrémie avec osmolalité plasmatique élevée peut être observée au cours des hyperglycémies ou de l'administration de manitol hypertonique qui tous les deux induisent un mouvement osmotique d'eau en-dehors de la cellule et diminue la concentration plasmatique de sodium par dilution. Dans la mesure où il n'y a pas d'hypo-osmolalité et donc pas de risque d'oedème cérébral, le traitement de l'hyponatrémie n'est pas indiqué dans ces anomalies à l'exception de l'administration de glycine. Dans cette situation, l'osmolalité plasmatique peut diminuer avec le temps lorsque la glycine est spontanément métabolisée. Chez les patients ayant une osmolalité plasmatique normale ou élevée contrastant avec une hyponatrémie, ceci peut être mis en évidence par la mesure directe de l'osmolalité plasmatique par un osmomètre. Une autre alternative est l'estimation du contenu aqueux du plasma chez les patients avec une hyperlipidémie ou une hyperprotéinémie. Le contenu en eau du plasma (en %) peut être apprécié par la formule suivante :

Eau plasmatique (%) = 99,1 - (0,1 x L) - (0,07 x P)

où L et P correspondent à la concentration totale en lipides et en protéines en g/l respectivement.

    Osmolalité urinaire :

L'osmolalité urinaire peut être utilisée pour distinguer les défauts d'excrétion d'eau qui sont présents dans pratiquement tous les cas et la polydypsie primaire au cours de laquelle l'excrétion d'eau est normale mais l'apport hydrique si élevé qu'il dépasse les capacités sécrétoires rénales. La réponse normale à l'hyponatrémie qui est maintenue au cours de la polydipsie primaire est de supprimer complètement la sécrétion d'ADH aboutissant à l'excrétion d'urine maximalement diluée avec une osmolalité en-dessous de 100 mosmol/kg d'eau et une densité inférieure à 1003. Une valeur d'osmolalité urinaire supérieure à ce niveau indique une incapacité à excréter normalement l'eau libre, ce qui est généralement lié à une sécrétion persistante d'ADH. La plupart des patients hyponatrémiques ont une altération relativement marquée de la dilution des urines, ce qui se traduit par une osmolalité urinaire à 300 mosmol/kg ou plus.

Il existe deux autres formes d'hyponatrémie en-dehors de la polydipsie primaire au cours de laquelle l'osmolalité urinaire peut descendre en-dessous de 100 mosmol/kg : les situations de malnutrition notamment chez les grands buveurs de bière chez lesquels l'apport en solutés d'origine alimentaire (sodium, potassium, protéines) et donc l'excrétion rénale de soluté est tellement basse que le débit d'excrétion hydrique est fortement diminué même si les capacités de dilution urinaire sont intactes. De même une modification du seuil de l'osmostat ("reset osmostat") qui supprime de façon appropriée la libération d'hormone antidiurétique après une charge hydrique. Le principal indice de cette anomalie est la mise en évidence d'une natrémie modérément abaissée, habituellement entre 125 et 135 mmol/l qui est stable sur des prélèvements succéssifs.

    Concentration urinaire de sodium

En l'absence d'insuffisance surrénale ou d'hypothyroïdie, les deux principales causes d'hyponatrémie hypoosmolaire et d'urines concentrées de façon inappropriée sont les déplétions volémiques effectives ou le SIADH. Ces affections peuvent généralement être distinguées par la concentration urinaire de sodium qui est typiquement inférieure à 25 mmol/l au cours de l'hypovolémie (en-dehors des hypovolémies liées à une fuite rénale de sodium, le plus souvent en rapport avec un traitement diurétique) et supérieure à 40 mmol/l chez les patients avec un SIADH qui sont normovolémiques et dont l'excrétion sodée urinaire est déterminée par (égal à) l'apport sodé alimentaire.

La mesure séquentielle de la concentration urinaire de sodium peut également être utile dans certains cas où le diagnostic initial n'est pas clair. Par exemple la chute de la concentration urinaire de sodium de 50 à 10 mmol/l après l'administration d'un ou deux litres de soluté salé isotonique fait évoquer la possibilité d'une ingestion occulte de diurétiques thiazidiques. La concentration sodée urinaire est élevée initialement en raison de l'action des diurétiques. Lorsque celle-ci s'atténue l'état de déplétion volumique sous-jacent est démasqué par la réhydratation partielle. Inversement un patient dont la concentration urinaire de sodium est basse à 5 mmol/l mais qui augmente avec augmentation de l'apport sodé peut correspondre à SIADH initialement en restriction sodée et dont la natriurèse augmente proportionnellement à l'apport.

    Excrétion fractionnelle de sodium

L'excrétion fractionnelle de sodium est un indice relativement précis du volume plasmatique, supérieur à la simple détermination de la concentration urinaire de sodium, chez les patients en insuffisance rénale aiguë. Dans lIRA, une fraction d'excrétion de sodium inférieure à 1 % suggère une déplétion volémique efficace avec insuffisance rénale fonctionnelle.
Le recours à la fraction d'excrétion du sodium nest cependant pas aussi pertinent chez les patients avec une fonction rénale relativement normale car la valeur permettant de différencier une déplétion volémique et l'euvolémie varie largement en fonction du débit de filtration glomérulaire. Une fraction d'excrétion du sodium de 1 % ne permet pas de différencier les deux situations car cette valeur peut être observée chez des patients euvolémiques, y compris ceux avec SIADH qui ont une concentration urinaire de sodium supérieure à 50 mmol/l et qui excrètent plus de 100 mmol de sodium par jour.

    Balance acide-base et potassique

L'évaluation de l'équilibre acide-base et de la balance potassique peut être utile chez certains patients hyponatrémiques chez lesquels le diagnostic n'est pas évident. La présence d'une alcalose métabolique avec hypokaliémie suggère des vomissements ou des diurétiques occultes. L'acidose métabolique et l'hypokaliémie suggèrent diarrhées ou abus de laxatifs et une acidose métabolique hyperkaliémique suggère une insuffisance surrénale.
Chez les patients avec SIADH, la concentration plasmatique de bicarbonate et de potassium sont typiquement normales. Bien que la rétention hydrique tend à diminuer ces valeurs par effet de dilution, des valeurs normales sont restaurées par les facteurs qui régulent normalement la balance acide-base et potassique. La sortie de potassium depuis les cellules pour minimiser l'oedème cellulaire induit par l'hypoosmolalité est un facteur supplémentaire normalisant la concentration plasmatique de potassium.

Diagnostic différentiel : pseudohyponatrémies

La pseudohyponatrémie représente une affection au cours de laquelle l'hyponatrémie est associée à une osmolalité plasmatique normale ou élevée mais en tous cas pas abaissée. Ces patients nont pas de risque de développer des symptômes reliés à l'hyponatrémie qui sont essentiellement un oedème cérébral induit par l'hyposmolalité.

    Osmolalité plasmatique élevée

L'hyponatrémie avec une osmolalité plasmatique élevée est la plus généralement rencontrée au cours de l'hyperglycémie ou de l'administration et de la rétention de manitol hypertonique. Dans ces conditions, l'augmentation de l'osmolalité plasmatique induite par le glucose ou le manitol chasse l'eau des cellules, ce qui diminue la concentration plasmatique du sodium par dilution. D'une façon générale, la natrémie diminue d'1 mmol/l pour chaque augmentation de 3,5 mmol/l (0,6 g./l) d'augmentation de la concentration plasmatique de glucose ou de manitol (qui ont le même poids moléculaire). Une situation similaire peut être induite par la rétention de maltose lorsque des immunoglobulines intraveineuses sont administrées dans une solution de maltose à 10 % chez des patients ayant une insuffisance rénale.

L'insuffisance rénale est également une affection au cours de laquelle l'hyponatrémie peut être associée à une osmolalité plasmatique élevée liée à la rétention d'urée. Cependant l'urée est une osmole inefficace car elle traverse librement les membranes cellulaires. Pour cette raison l'accumulation d'urée n'entraîne pas de mouvement d'eau et ces patients n'ont pas vraiment d'hypotonicité.

    Osmolalité plasmatique normale

L'hyponatrémie avec osmolalité plasmatique normale peut survenir lorsqu'il existe une réduction de la fraction d'eau plasmatique. Chez les sujets normaux, l'eau plasmatique est d'environ 93 % du volume plasmatique, les lipides et protéines représentant les 7 % restant. Ainsi une concentration plasmatique de sodium normale de 142 mmol/l (par litre de plasma) représente en réalité une concentration de 154 mmol/l dans l'eau plasmatique. La fraction d'eau plasmatique peut diminuer en-dessous de 80 %, chez les patients avec une hyperlipidémie marquée (sérum lactescent dans les diabètes décompensés) ou une hyperprotéinémie (myélome). Dans ces conditions, la concentration sodique dans l'eau plasmatique et l'osmolalité plasmatique sont inchangées mais la concentration mesurée de sodium dans le plasma total est réduite.

L'hyponatrémie isoosmotique peut être également produite par l'addition de liquide iso-osmotique mais dépourvu de sodium à l'espace extracellulaire. Ceci survient essentiellement avec l'utilisation de glycine ou de sorbitol dans des solutions de lavage pendant la résection transurétrale de prostate ou de vessie car des quantités non négligeables de cette solution sont absorbées. Ces patients peuvent développer une hyponatrémie marquée en-dessous de 110 mmol/l et des symptômes neurologiques. Il n'est pas établi si ces anomalies neurologiques sont liées à la baisse de la natrémie elle-même ou à la toxicité de la glycine ou de l'ammoniaque généré pendant le métabolisme de la glycine.

Causes des hyponatrémies hypo-osmolaires

Dans pratiquement tous les cas, l'hyponatrémie résulte d'un apport d'eau excessif dépassant les capacités d'excrétion rénale. Chez les sujets normaux, une charge hydrique est normalement rapidement excrétée car la baisse de l'osmolalité plasmatique supprime la libération d'hormone antidiurétique permettant ainsi l'excrétion d'une urine diluée. Le débit maximum d'excrétion d'eau sous régime alimentaire normal est de plus de 10 litres par jour.
Sous-jacents à tous les états hyponatrémiques est la limitation de la dilution urinaire. Ceci est généralement du à une sécrétion persistante d'ADH malgré l'hypo-osmolalité sérique. La sécrétion de l'ADH est alors stimulée par des mécanismes non osmotiques.
Moins couramment une diminution du débit de fluide délivré au néphron distal lié par exemple à une diminution de la filtration glomérulaire et/ou une augmentation de la réabsorption proximale de fluide et de sodium ou encore un défaut de transport du NaCl dans le segment de dilution du néphron (branche ascendante large de l'anse de Henle et tube distal) ce qui limite la dilution des urines.

    1. Hyponatrémies au cours desquelles la concentration d'ADH est élevée.

Les deux principales causes d'hyponatrémie hypoosmotique sont la déplétion volémique (hypovolémie) et le syndrome de sécrétion inappropriée d'ADH (SIADH).

    a) Hypovolémies (absolues ou relatives)

D'une façon générale, la diminution de la perfusion tissulaire est un stimulus très puissant de la sécrétion d'ADH. Cette réponse est médiée par les barorécepteurs des sinus carotidiens qui perçoivent une réduction de pression ou d'étirement et cette stimulation annule l'effet inhibiteur de l'hyponatrémie sur la sécrétion d'ADH. La réponse ADH est inappropriée à losmolalité mais adaptée à la volémie qui constitue un stimulus prioritaire.

voir la figure "Stimulation osmotique et non-osmotique de la libération de 'AVP. La régulation "osmotique" de l'AVP dépend d'un osmorécepteur dont les cellules sont situées dans l'hypothalamus antérieur à proximité mais distinct du noyau supraoptique. Les stimuli non-osmotiques de l'AVP sont la douleur physique, le stress émotionnel et surtout la pression artérielle et la volémie. Une diminution de 7-10% soit de la pression artérielle soit de la volémie entraine une libération d'AVP. Le maintien du volume circulant est prioritaire sur les mécanismes régulant l'osmolalité si bien que la sécrétion "hypovolémique" de l'AVP persiste malgré la baisse de l'osmolalité.
voir la figure Même notion que précedamment, la sécrétion d'AVP est stimulé prioritairement par l'hypovolémie : à la fois le seuil osmotique de libération de l'AVP est abaissé par l(hypovolémie et la pente AVP/osmolalité est plus abrupte.

  • Une déplétion volémique vraie
    Les vomissements, diarrhées, saignements ou pertes urinaires sont responsables d'hyponatrémie par déplétion volémique. Ces patients ont à la fois un déficit en sodium et en eau, le déficit en sodium étant supérieur à celui de l'eau. Le mécanisme sous-jacent est une contraction volémique stimulant la sécrétion d'ADH avec la poursuite d'un apport hydrique oral ou parentéral hypotonique. La mesure de la concentration urinaire de sodium permet de différencier l'origine rénale ou extrarénale de la perte de liquide.
    Il est important de noter que c'est bien lhypovolémie qui est le stimulus principal de sécrétion dADH et non pas la perte de sel qui induit l'hyponatrémie. Dans ce cas, la réexpansion volémique par colloides, même sans apport sodé, permet de corriger l'hyponatrémie.

    Les pertes gastrointestinales liées à un troisième secteur sont associées à une rétention avide de sodium car le rein répond à la contraction volémique en conservant le NaCl. La concentration urinaire de sodium est habituellement inférieure à 10 mmol/l et l'urine est hyperosmolaire. Chez quelques patients ayant des vomissements et une alcalose métabolique, une bicarbonaturie peut survenir. Le bicarbonate est un anion non réabsorbable favorisant l'excrétion obligée de cations, si bien que dans cette situation la concentration urinaire de sodium peut être supérieure à 20 mmol/l malgré une déplétion volémique sévère. Dans ce cas cependant, la concentration urinaire de chlore est inférieure à 10 mmol/l.

    Les diurétiques thiazidiques peuvent occasionnellement provoquer des hyponatrémies aiguës et souvent sévères. Le traitement diurétique est l'une des causes les plus fréquentes d'hyponatrémie hypovolémiques associée avec une concentration urinaire élevée en sodium.
    L'hyponatrémie survient presque exclusivement avec les diurétiques thiazidiques dans la mesure ces médicaments agissent exclusivement dans le tubule distal interférant avec la dilution des urines. Les femmes âgées, de petit poids, apparaissent davantage susceptibles à cette complication qui survient habituellement dans les quinze premiers jours du début du traitement. Plusieurs mécanismes ont été imputés pour déclencher cette hyponatrémie induite par les diurétiques, notamment la sécrétion d'ADH stimulée par l'hypovolémie, l'interférence avec le mécanisme de dilution urinaire dans le segment cortical de dilution et enfin une altération de la sensibilité aux osmorécepteurs et de la soif, liée à la déplétion potassique.
    Remarque : Inversement, l'hyponatrémie est exceptionnellement observée avec un traitement par diurétique de l'anse. Les diurétiques de l'anse inhibent la réabsorption de NaCl dans la branche ascendante large de l'anse de Henle et interfèrent avec la génération d'un interstitium médullaire hypertonique et donc le mécanisme de concentration-dilution des urines.

    Les néphropathies avec perte de sel surviennent chez certains patients avec une maladie rénale chronique avancée et qui sont incapables de conserver le sodium. Ceci est observé au cours de la néphronophtise, de la polykystose rénale, de la néphropathie des analgésiques, de la pyélonéphrite chronique et de l'uropathie obstructive. Les patients avec une acidose tubulaire proximale de type 2 ont une perte de sel et de potassium malgré une insuffisance rénale très modérée. Chez ces patients la bicarbonaturie entraîne une fuite urinaire de sodium obligatoire. L'hyponatrémie avec contraction du volume extracellulaire associée à une concentration urinaire de sodium supérieure à 20 mmol/l, notamment associée à une hyperkaliémie et une augmentation variable de la créatinine suggèrent un déficit en minéralocorticoïdes. La diminution du volume extracellulaire plus que le déficit hormonal en lui-même représente la stimulus non osmotique pour la libération de l'ADH.

    Au cours de la diurèse osmotique, des solutés non réabsorbables provoquent une fuite obligatoire de sodium et ceci aboutit à une déplétion volémique. L'apport continu de fluides hypotoniques entraîne une hypovolémie et une hyponatrémie. La concentration urinaire de sodium est typiquement supérieure à 20 mmol/l. Au cours du diabète, la fuite de sodium est accentuée par l'acétonurie qui cause également une fuite obligatoire rénale de sodium. Le béta-hydroxybutyrate et l'acétocétate sont également responsables d'une fuite obligatoire d'électrolytes ce qui aggrave la perte rénale de sodium observée au cours de l'acidocétose diabétique, du jeûne et de l'acidocétose alcoolique.

  • Hyponatrémie des syndromes oedémateux (Insuffisance cardiaque congestive, cirrhose hépatique et syndrome néphrotique)

    Même si le bilan sodé de l'organisme, voire le volume plasmatique peuvent être fortement augmentés dans ces affections, la pression-étirement perçue au niveau des barorécepteurs du sinus carotidien est réduite en raison de la chute du débit cardiaque dans l'insuffisance cardiaque et en raison de la vasodilatation périphérique dans la cirrhose hépatique. On parle alors d'hypovolémie efficace ou relative.
    Les conditions cliniques associées sont l'insuffisance cardiaque, hépatique et rénale et le syndrome néphrotique. Dans ce cas, le contenu total en sodium de l'organisme est augmenté mais le contenu en eau de l'organisme est augmenté de façon encore plus importante ce qui aboutit à l'hyponatrémie.

    Dans l'insuffisance cardiaque congestive, la diminution du débit cardiaque et souvent de la pression artérielle contribuent à la libération non osmotique d'ADH. L'augmentation de l'effet rénal de l'ADH est également reflétée par une up-régulation de l'aquaporine 2 (AQP2), le canal à eau régulé par lADH au niveau des tubes collecteurs chez les rats ayant une insuffisance cardiaque. L'hyponatrémie est de plus aggravée par une stimulation associée du système rénine-angiotensine et de la production de catécholamines. Ces facteurs hormonaux en diminuant le débit de filtration glomérulaire et en augmentant la réabsorption tubulaire proximale de sodium diminuent le débit de fluide délivré au tube distal contribuant aussi à l'hyponatrémie. Le degré d'activation neuro-hormonale corrèle avec la sévérité clinique de la dysfonction ventriculaire gauche et le degré d'hyponatrémie est également de grande valeur pronostique chez ces patients.

    Les patients avec une insuffisance hépatique et une cirrhose partagent des mécanismes physiopathologiques similaires à ceux des patients en insuffisance cardiaque. La caractéristique de la cirrhose est la vasodilatation périphérique et splanchnique aboutissant à la rétention rénale de sodium. Cependant ces patients ont une augmentation du débit cardiaque essentiellement en raison de multiples fistules artério-veineuses du tractus digestif et de la peau. La vasodilatation pourrait être médiée par l'oxyde nitrique (NO). L'inhibition du NO corrige l'hyporéactivité artérielle aux vasoconstricteurs ainsi que l'excrétion anormale d'eau chez les rats cirrhotiques. Lorsque la cirrhose s'aggrave (absence d'ascite, puis ascite, puis ascite avec syndrome hépatorénal) on observe une augmentation progressive de la concentration plasmatique de rénine, de noradrénaline et de l'activité ADH. La pression artérielle moyenne, l'excrétion d'eau et la natrémie chutent. L'hyponatrémie est un indicateur puissant d'un mauvais pronostic à long terme chez ces patients. L'ADH joue un rôle crucial dans la physiopathologie du défaut d'excrétion d'eau car les rats cirrhotiques génétiquement déficients en cette hormone ne développent pas d'hyponatrémie. L'expression du gène de l'aquaporine 2 régulée par l'ADH est également augmentée chez ces rats cirrhotiques.

    les patients avec un syndrome néphrotique, tout particulièrement lorsque la fonction rénale reste normale, ont une contraction du volume intravasculaire, tout particulièrement lorsque lalbuminémie est < 15-20 g/l. Lhypovolémie efficace stimule la libération non osmotique d'ADH ce qui altére l'excrétion de l'eau. Par opposition avec les autres causes d'hyponatrémie au cours desquelles l'expression de l'aquaporine 2 est augmentée, dans les modèles expérimentaux de syndrome néphrotique, l'expression de cette protéine au niveau des tubes collecteurs est diminuée.

    b) Syndrome de sécrétion inappropriée d'ADH (SIADH)


Une rétention hydrique et une libération persistante d'ADH peut être observée dans un grand nombre de maladies qui ne sont pas associées à une hypovolémie.
Le syndrome de sécrétion inapproprié d'ADH (SIADH) est la cause la plus fréquente d'hyponatrémie chez des patients hospitalisés. Il s'agit d'un diagnostic d'exclusion. L'osmorégulation défectueuse de l'ADH stimule la concentration plasmatique d'ADH aboutissant à des urines concentrées inappropriées pour le degré d'hypotonicité. Les causes les plus fréquentes de SIADH sont les cancers, les maladies pulmonaires et du système nerveux central. Les saignements cérébraux, les tumeurs, les infections et les traumatismes cérébraux sont responsables de SIADH par excès de libération d'ADH. Dans les cancers habituellement des cancers pulmonaires à petites cellules, du duodénum, du pancréas et le neuroblastome du nerf olfactif, il existe une production ectopique d'ADH et ces tissus sont capables de produire et d'augmenter une sécrétion d'ADH en réponse à une stimulation osmotique in vitro.

L'infection par le virus VIH est une cause croissante de SIADH. Jusqu'à 35 % des patients avec le SIDA et hospitalisés développent un SIADH. Les pneumopathies à Pneumocystis carinii, les infections du système nerveux central et les cancers en sont les causes habituelles.

Chez 1/3 des patients avec un SIADH, la sécrétion d'ADH varie de façon appropriée avec la natrémie, mais le seuil de libération est anormalement bas suggérant un réajustement de l'osmostat. Ces patients ont une natrémie stable entre 125 et 135 mmol/l. Toute ingestion d'eau libre au-dessus de ce seuil aboutit à l'excrétion d'eau maintenant la natrémie. Les patients avec un SIADH ne peuvent excréter une urine dépourvue de soluté, si bien que toute l'eau ingérée est retenue et entraîne une expansion volémique modérée, sans oedème et une hyponatrémie de dilution. Cependant l'hyponatrémie est limitée par un échappement à la vasopressine. Ce mécanisme d'échappement à l'antidiurèse est lié à une diminution sélective et marquée de l'expression des canaux à eau aquaporines 2, régulés par la vasopressine sans diminution concomitante de l'expression des autres canaux à eau.
Le traitement de l'hyponatrémie dans cette condition précise est à la fois inutile car les patients sont asymptomatiques et inefficace dans la mesure où la natrémie atteinte est reconnue par l'organisme comme normale et qu'une augmentation des valeurs de natrémie stimulent la soif.

    c) Médicaments/iatrogènes

Certaines formes de SIADH sont secondaires à des médicaments ou à des contextes iatrogènes
Les patients avec une psychose aiguë secondaire à une schizophrénie ont une tendance à développer une hyponatrémie. Le mécanisme en est multifactoriel comprenant une augmentation de la perception de la soif, menant à la polydypsie, un défaut modéré de l'osmorégulation aboutissant à une sécrétion d'ADH à une osmolalité plus basse que normalement et enfin une réponse rénale augmentée à l'ADH. Les médicaments antipsychotiques pourraient également jouer un rôle.

L'hyponatrémie est fréquente après chirurgie et caractérisée par des concentrations circulantes d'ADH très élevées en raison du stress, de la douleur et des produits anesthésiques. La perfusion de quantités excessives de solutés sans électrolytes (soluté salé hypotonique ou glucosé 5%) est en cause dans ce cas. Même des perfusions de solutés salés isotoniques administrées dans les 24 heures après l'induction d'une anesthésie semblent pouvoir induire une hyponatrémie. Ceci est lié essentiellement à la génération d'eau hypotonique par le rein en raison de la persistance d'une sécrétion d'ADH.

L'hyponatrémie induite par les médicaments est médiée par des analogues de l'ADH tels que la desmopressine ou par des agonistes de la libération d'ADH ou encore des agents potentialisant l'action de l'ADH au niveau du tubule rénal. Les médicaments responsables d'hyponatrémie comprennent les agents psychoactifs (fluoxetine, sertraline, thiothixene, halopéridol et amitriptiline) ainsi que l'ectasy (une drogue apparentée aux amphétamines), certains agents anticancéreux (vincristine, vinblastine, cyclophosphamide à hautes doses) et différents médicaments tels que la carbabazépine, la bromocriptine, la lorcainide, le chlorpropamide et la vasopressine intraveineuse.

    d) Endocrinopathies

L'hyponatrémie peut être observée chez des patients en insuffisance surrénale où le déficit en cortisol est responsable de l'hyponatrémie, ainsi quau cours de l'hypothyroïdie. L'augmentation de la libération dhormone gonadotrope (HCG) au cours de la grossesse peut être responsable d'une légère hyponatrémie d'environ 5 mmol/l attribuée à une diminution du seuil de l'osmostat.
l'insuffisance en glucocorticoïdes altère l'excrétion d'eau au cours de linsuffisance surrénale, quelle soit primitive et secondaire. L'augmentation des concentrations d'ADH a été démontrée même en l'absence de contraction volémique. Des facteurs indépendants de l'ADH sont également impliqués puisque le déficit en glucocorticoïdes est associé à une altération de l'hémodynamique rénale. L'insuffisance en glucocorticoïdes pourrait aussi augmenter la perméabilité à l'eau dans le tube collecteur en l'absence d'ADH.

L'hypothyroïdie avec myxoedème est associée à une hyponatrémie. La réponse ADH est diversement appréciée dans cette situation. Dans la mesure où le débit cardiaque est diminué ainsi que le débit de filtration glomérulaire, des mécanismes intrarénaux et médiés par l'ADH sont probablement tous deux impliqués avec des contributions variables selon les patients.

    2. L'hyponatrémie hypoosmolaire au cours desquelles la concentration d'ADH est supprimée de façon appropriée.

Deux circonstances sont en cause : l'insuffisance rénale avancée et la polydypsie primaire.

    a) Insuffisance rénale avancée

La capacité d'excréter l'eau libre est relativement maintenue chez les patients ayant une insuffisance rénale modérée à légère. En cas d'oligurie ou d'insuffisance rénale avancée, par contre l'osmolalité urinaire minimale augmente jusqu'à 200 ou 250 mosmol/kg malgré une suppression appropriée de l'ADH. Ceci est lié à une diurèse osmotique induite par l'excrétion augmentée de solutés par néphron restant fonctionnel, ce qui aboutit à l'incapacité à diluer les urines maximalement. Cette forme d'hyponatrémie peut être prévenue par l'ajustement des apports hydriques à la diurèse. Si les apports en eau quotidiens dépassent ce seuil, une balance hydrique positive survient et aboutit à l'hyponatrémie.

    b) Polydipsie primitive

La polydipsie primitive est une maladie au cours de laquelle il existe une stimulation primitive de la soif. Ceci est plus généralement observé chez des femmes d'âge moyen, anxieuses et chez des patients avec des maladies psychiatriques, notamment s'ils prennent des drogues antipsychotiques dont un effet secondaire fréquent est la sécheresse de bouche, ce qui stimule la soif et l'apport hydrique. La polydipsie peut également survenir à l'occasion de lésions de l'hypothalamus, comme c'est le cas de maladie infiltrant l'hypothalamus (sarcoïdose par exemple), ce qui stimule directement les centres de la soif.

La natrémie est habituellement normale ou seulement faiblement réduite chez les patients avec une polydypsie primitive, car l'excès d'eau est rapidement excrété. Dans de rares cas cependant les apports hydriques excèdent 10 à 15 litres par jour et une hyponatrémie peut survenir malgré des urines diluées de façon maximale avec une osmolalité adaptée en-dessous de 100 mosmol/kg. Une hyponatrémie symptomatique peut également être induite par une charge hydrique aiguë plus modérée de 3 à 4 litres chez des patients anxieux (à loccasion par exemple dune préparation à une examen radiologique). La tendance à l'hyponatrémie dans cette circonstance est augmentée s'il existe également une altération de l'excrétion d'eau, comme cela peut être facilité par une libération d'ADH induite par l'état nauséeux ou le stress ou encore un traitement diurétique associé.

    c) Apports réduits en solutes alimentaires

Les buveurs de bière et d'autres patients malnutris peuvent développer une réduction très importante des capacités d'excrétion de l'eau qui est directement liée à la diminution de l'apport alimentaire. Les sujets normaux peuvent excréter 600 à 900 mosmol/kg de solutes chaque jour essentiellement du sodium, du potassium et de l'urée si bien que l'osmolalité urinaire minimale est d'environ 60 mosmol/kg, ce qui autorise un débit urinaire maximum de 10 à 15 litres par jour. La bière contient relativement peu de sodium, potassium, de protéines et la charge glucidique supprime le catabolisme protéique endogène, si bien que l'excrétion uréique devient négligeable. Il en résulte que l'excrétion quotidienne de solutés peut diminuer en-dessous de 250 mosmol/kg aboutissant à réduire la capacité maximale d'élimination des urines à 4 litres par jour, même si l'urine est diluée de façon appropriée. L'hyponatrémie survient lorsque les apports hydriques dépassent les capacités d'excrétion.

Pr T. Hannedouche


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  Kumar S, Berl T. Sodium. Lancet 1998;352:220

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