La régulation de l'osmolalité plasmatique et son principal déterminant, la concentration plasmatique de sodium est obtenue par des modifications de l'apport en eau ou de son excrétion. Il n'est donc pas surprenant que les altérations de la concentration plasmatique de sodium (que ce soit une hyponatrémie ou une hypernatrémie) nécessitent habituellement une anomalie de l'un ou de l'autre des facteurs qui affectent la balance hydrique : la libération d'hormone antidiurétique et la soif.
2. Principaux déterminants de la concentration plasmatique de sodium
Les principaux déterminants de la concentration plasmatique de sodium peuvent être appréciés à partir de calculs simples liés à l'osmolalité plasmatique. L'osmolalité plasmatique peut être estimée à partir de la formule suivante :
osmolalité plasmatique = 2 (natrémie + kaliémie) + glycémie.
Les valeurs étant exprimées en mmol/l. L'urée est parfois incorporée dans cette formule mais dans la mesure où cette petite molécule diffuse librement à travers les membranes, elle ne se comporte pas de façon osmotiquement active.
3. Importance clinique de l'osmorégulation :
En raison de la capacité de l'eau à diffuser librement à travers pratiquement toutes les membranes cellulaires, la maintenance d'une concentration plasmatique de sodium relativement constante ainsi que de l'osmolalité plasmatique est essentielle au maintien du volume cellulaire particulièrement dans le cerveau. Ainsi une réduction aiguë de l'osmolalité plasmatique et de la concentration plasmatique de sodium sur quelques heures crée un gradient osmotique à l'origine d'un mouvement d'eau depuis le secteur extracellulaire vers la cellule responsable dun Sdème cellulaire. En raison du caractère inextensible de la boite crânienne, l'oedème cellulaire cérébral entraîne des symptômes neurologiques sévères pouvant aboutir à la mort. La situation est différente lorsque la concentration plasmatique de sodium est modifiée lentement. Dans cette situation, l'augmentation du contenu en eau cérébrale est nettement moindre et les patients sont cliniquement asymptomatiques.
4. Régulation des osmolytes et du volume cellulaire :
La seule façon de maintenir un volume cellulaire cérébral normal en face d'une hyponatrémie persistante est déliminer des solutes intracellulaires, ce qui est suivi dune perte osmotique d'eau. Le sodium, le potassium, les solutes organiques (inositol) et certains acides aminés comme la glutamine et la taurine contribuent à cette réponse adaptative. Le sodium et le potassium rendent compte approximativement de 2/3 de cette perte de solutes cellulaires. Les modifications fractionnelles sont cependant différentes puisque seulement 10 % des cations cellulaires sont extrudés alors que plus de 60 % des solutes organiques sont éliminés. Ces solutes organiques jouent un rôle physiologique important et ont été appelés osmolytes. Bien que la perte de n'importe quel type de solutés tend à corriger l'oedème cellulaire, les osmolytes ont un avantage supplémentaires car la modification de leur concentration n'interfèrent pas avec les fonctions protéiques cellulaires (à la différence des modifications de la concentration intracellulaire de sodium et de potassium).
Des considérations analogues s'appliquent à l'hypernatrémie bien que les mouvements d'eau et de solutes se fassent dans la direction opposée. L'augmentation initiale de la concentration plasmatique de sodium produit un mouvement osmotique d'eau depuis la cellule vers l'extérieur et un contraction cérébrale. Dès le premier jour cependant la concentration de solutes cellulaires augmente entraînant un mouvement d'eau vers la cellule et la restauration d'un volume cellulaire cérébral vers la normale. Les osmolytes rendent compte d'environ 1/3 de cette réponse (accumulation d'inositol, de glutamine et de glutamate dans les cellules). L'augmentation de la capture d'inositol dans le compartiment extracellulaire est médiée par une augmentation du nombre de transporteurs de l'inositol dans la membrane cellulaire. Il n'est pas déterminé si la glutamine et les glutamates proviennent de la dégradation des protéines cellulaires ou de la captation dans le liquide extracellulaire.
5. Implications pour la clinique et la thérapeutique
Les flux séquentiels d'eau induits par les modifications de la concentration plasmatique de sodium et de l'osmolalité ont d'importantes implications à la fois pour le développement des symptômes neurologiques et pour le traitement.
D'une façon générale, seules les hypo ou hypernatrémies aiguës sont responsables de symptômes neurologiques (léthargie, comitialité, coma) liés à l'oedème cérébral et à l'atrophie cérébrale respectivement. Les adaptations ultérieures qui restaurent le volume cérébral vers la normale sont généralement si efficaces que peu ou pas de symptômes sont observés chez les patients ayant des modifications chroniques de la concentration plasmatique de sodium (survenant sur plus de quelques jours).
Ces adaptations sont également importantes à considérer pour la vitesse de correction du traitement. En effet lorsque l'oedème cérébral a été partiellement corrigé par la perte de solutes cellulaires, une correction rapide de l'hyponatrémie peut réduire le volume cérébral en-dessous de la normale et produire un syndrome de démyélinisation osmotique incluant notamment une myélinolyse centropontine. Cette affection qui peut aboutir à des lésions neurologiques sévères et irréversibles est caractérisée par une paraparésie, quadriparésie, dysarthrie, dysphagie et coma. Les données expérimentales et cliniques suggèrent que c'est essentiellement les vitesses de correction dépassant 0,5 mmol/l/jour et surtout 12 mmol/l sur 24 heures qui sont susceptibles de provoquer cette complication.
Des constatations analogues s'appliquent à l'hypernatrémie chronique dans la mesure où une réduction trop rapide de la natrémie peut entraîner un oedème cérébral et comitialité. Le but du traitement est différent chez les patients ayant une dysnatrémie symptomatique. Dans ce cas, une correction initiale rapide est sans danger et peut même au contraire éviter le décès. La concentration plasmatique de sodium peut être normalisée à une vitesse de 1,5 à 2 mmol/l/h jusqu'à la résolution des symptômes, puis suivie par une correction plus lente vers la normale, la vitesse de modification maximale de la natrémie ne devant pas dépasser 12 mmol/l et par 24 heures.