1. Introduction
Les différents facteurs de risque vasculaire interagissent entre eux de façon synergique pour augmenter la survenue des complications cardiovasculaires .
Le calcul du risque cardio-vasculaire absolu (RCVA) basé essentiellement sur l'étude épidémiologique de Framingham a été récemment proposé comme outil d'estimation intégré du risque cardio-vasculaire global global (voir la page "Risque cardio-vasculaire absolu"). Des équations sont ainsi disponibles permettant de prédire le RCVA individuel à partir de l'ensemble des principaux facteurs de risque vsculaire indépendants identifiés dans l'étude de Framingham (voir le tableau "Facteurs de risque vasculaires indépendants selon Framingham"). Ces équations de risque pondèrent les différents facteurs de risque vasculaire et permettent de prédire le risque d'évènement coronarien majeur ou d'accident vasculaire cérébral sur un intervalle de 4 à 12 ans (1,2). Les avantages incontestables mais aussi les limites méthodologiques et conceptuelles d'une telle approche sont décrits dans la page "Risque cardio-vasculaire absolu" .
Par opposition à l'hypertension artérielle essentielle, situation au cours de laquelle les patients sans facteurs de risque vasculaire associés développent relativement peu d'évènements coronariens ou cérébraux, les patients ayant une atteinte rénale paient un lourd tribut aux complications cardio-vasculaires. Dans cette revue, nous avons cherché à établir :
- quel excès de risque cardio-vasculaire est précisement associé à la présence d'une atteinte rénale;
- si cet excès est lié à une prévalence accrue des facteurs de risque vasculaire traditionnels ou à la présence d'autres facteurs de risque plus spécifiques d'une atteinte rénale ;
- dans quelle mesure le RCVA et les équations de risque sont-ils applicables aux patients ayant une atteinte rénale.
Nous nous sommes délibérement limités à l'atteinte rénale de nature non-diabétique qui fait l'objet de peu d'attention. En revanche, la valeur pronostique négative de la microalbuminurie sur l'avenir rénal dans le diabète de type 1 et sur la survie dans le diabète de type 2 est largement démontrée et a fait l'objet de mises au point extensives récentes.
2. Le RCVA est-il plus élevé chez les malades avec une atteinte rénale que chez les hypertendus sans atteinte rénale ?
Quelques études sont disponibles concernant la valeur prédictive de la protéinurie ou de l'insuffisance rénale sur le risque cardio-vasculaire.
La présence d'une protéinurie isolée a longtemps été considérée comme "bénigne" ne conférant aucun risque particulier à long-terme. Cependant plusieurs études rétrospectives ont retrouvé une relation forte entre la présence d'une protéinurie et la morbidité cardiovasculaire (6,7).
Dans l'étude suédoise de Göteborg (6) réalisée chez 835 patients hypertendus traités suivis pendant au moins 10 ans, l'excrétion urinaire d'albumine est significativement plus élevée chez les patients qui développent une complication cardio-vasculaire (120 ± 52 mg/24 h vs 23 ± 8 mg/24 h, P < 0,05). L'incidence cumulée des évènements cardio-vasculaires est significativement plus importante chez les 41 malades protéinuriques (37 % à 10 ans) que chez les patients sans protéinurie (13 % à 10 ans) .
Dans cette étude, la valeur prédictive de la protéinurie excède largement celle des facteurs de risque classiques (tabagisme et hypercholestérolémie). Ainsi, la valeur prédictive de la protéinurie a une puissance similaire à celle de insuffisance coronaire symptomatique (risque 42 % à 10 ans). A l'inverse (et ceci valide la représentativité de l'étude), les sujets hypertendus non-fumeurs et sans hypercholestérolémie ont un risque faible (4 % à 10 ans) peu différent de celui de sujets normotendus de même âge.
A Framingham, la protéinurie n'a pas été systématiquement recherchée depuis le début de cette vaste étude épidémiologique. Une étude rétrospective retrouve cependant une prévalence de la protéinurie de 3-5 %, celle-ci étant plus importante chez les sujets hypertendus (x 2.3 à 4.4 selon l'âge et le sexe). La protéinurie, même de faible abondance, est associée à un excès de mortalité totale et cardiovasculaire : odds ratio 1.3 (IC 0.6-2.7) chez les femmes, 1.7 (IC 1.0-2.9) chez les hommes. La proportion d'évènements cardio-vasculaires mortels est en outre plus importante chez les sujets protéinuriques.
Dans l'étude britannique du DHCCP (4994 patients hypertendus traités suivis en moyenne pendant 51 mois), la prévalence initiale de la protéinurie est de 14-18 % (selon le sexe) (8). La protéinurie est plus fréquente chez les patients hypertendus qui décèdent (n = 156) que chez ceux qui survivent (n = 2431 ; 31 % vs 17 % ; p<0.001). Dans cette étude, les prédicteurs de mortalité ajustés pour l'âge sont le tabac, le diabète, la protéinurie et la créatinine plasmatique. Par contre, la cholestérolémie et l'obésité n'ont pas de valeur prédictive.
Dans l'étude nord-italienne CASTEL (9) (4805 sujets suivis pendant 10 ans), la prévalence de la protéinurie (>100 mg/dl) est de 7 %. La protéinurie est un prédicteur indépendant de mortalité totale et cardiovasculaire dans la tranche d'âge de 50 à 79 ans. Dans ce dernier groupe, la mortalité cardio-vasculaire à 10 ans est de 17.5 % dans le groupe protéinurique contre 11.9 % dans le groupe non-protéinurique (p<0.00001). Les prédicteurs indépendants de mortalité sont : âge, diabète, protéinurie, acide urique et l'index de masse corporelle.
La valeur prédictive de la microalbuminurie sur la morbidité-mortalité cardio-vasculaire est encore discutée en dehors du diabète. Ainsi dans une étude suédoise prospective chez 345 sujets hypertendus (hypercholestérolémiques et/ou fumeurs) âgés de 50-72 ans et suivis 3.3 ans en moyenne, la présence initiale d'une microalbuminurie (excrétion urinaire d'albumine 34-200 mg/24 h), retrouvée chez 24.3 % des patients, ne prédit pas la survenue subséquente de la morbidité-mortalité cardio-vasculaire. Par contre, la présence d'une "macro"albuminurie (excrétion urinaire d'albumine > 200 mg/24 h) est associée à une augmentation marquée de la morbidité cardio-vasculaire surtout coronaire (41.7 % vs 2.4 % (microalbuminurie), vs 9.6 % (normoalbuminurie) p < 0.0001) et de la mortalité cardio-vasculaire (16.7 %, vs 0 % (microalbuminurie), vs 4.0 % (normoalbuminurie) P < 0.01 (10).
3. L'insuffisance rénale même modérée confère également un risque cardio-vasculaire important.
Dans l'étude nord-américaine HDFP (11), 10,940 patients hypertendus ont été suivis pendant au moins 5 ans. Trois et 6 % de ces patients avaient une créatinine plasmatique ?150 µmol/l et 133 µmol/l respectivement. Chez ces malades tous traités pour leur hypertension (dont la moitié en milieu spécialisé), la mortalité globale (essentiellement cardio-vasculaire) à 8 ans est 2 à 4 plus importante (et proportionnelle à la concentration initiale de créatinine plasmatique) chez les patients ayant une insuffisance rénale modérée par rapport aux sujets ayant une créatinine plasmatique < 107 µmol/l, et après ajustement pour le niveau de pression artérielle.
Chez ces patients traités pour l'hypertension, la créatinine plasmatique augmente avec le temps : 25-28 % des patients dont la créatinine plasmatique initiale est supérieure à 150 µmol/l ont une augmentation d'au moins 25 % de la créatinine plasmatique à 5 ans. Curieusement seulement 3.1 % de la mortalité est directement attribuée à une cause rénale sans que la publication ne précise si c'est parce que les insuffisants rénaux sont dialysés (et donc ne meurent plus du rein), ou si ces malades décèdent réellement d'autres complications non directement liées au rein. Dans cette étude et après ajustement pour l'age, la valeur prédictive de la créatinine plasmatique sur la mortalité est supérieure à tous les autres facteurs en particulier le diabète, l'insuffisance coronaire ou l'hypertrophie ventriculaire gauche (HVG), pourtant considérés comme des facteurs prédictifs très puissants.
Dans une étude prospective nord-américaine chez 662 patients âgés (81 ± 8 ans), tous hypertendus et/ou diabétiques et suivis en moyenne pendant 41 mois, Aronow retrouve une créatinine plasmatique élevée >133 µmol/l (observée au moins à deux reprises) chez 28 % des patients (12). Pendant la période d'observation, un évènement coronarien majeur survient chez 61 % (60/99) des patients hypertendus non-diabétiques contre 44% (122/278) (P< 0,005) des patients hypertendus non diabétiques sans augmentation de la créatinine plasmatique. La survenue d'un évènement coronarien majeur est également plus fréquente chez les hypertendus diabétiques avec une créatinine plasmatique élevée : 72 % (42/58) vs 48 % (47/97) si la créatinine plasmatique est normale (P<0.005).
Une étude japonaise plus ancienne (période 1959-1973) (13) rapporte des résultats assez inquiétants dans une cohorte de sujets ayant une hypertension secondaire à une glomérulonéphrite. Chez ces hypertendus assez sévères, la présence d'une atteinte rénale mais sans "azotémie" implique une survie à 5 ans de 20 % contre 90 % en l'absence d'atteinte rénale. Il est possible que certaines de ces hypertensions "rénales" correspondent à des hypertensions malignisées secondairement.
Dans une étude danoise chez 216 sujets non-diabétiques âgés de 60-74 ans et suivis 62 à 83 mois, Damsgaard et al. retrouvent une surmortalité nette chez les sujets ayant une augmentation de la créatinine plasmatique (29/111 = %) contre (6/111) dans le groupe à créatinine plasmatique normale. Après ajustement sur l'ensemble des facteurs de risque, l'odds ratio de prédiction du risque de mortalité est de 4,16 (IC : 1,52-11,36 ; P<0,01) pour la créatinine plasmatique. Cette valeur prédictive de la créatinine plasmatique survient pour des augmentations modérées au-dessus de la médiane qui est de 93 µmol/l (sans distinction de sexe).
An Allemagne, Fliser et al. (15) rapportent également que dans une cohorte de 80 sujets insuffisants rénaux (créatinine plasmatique 220 µmol/l) et hypertendus non-diabétiques, le risque de décéder d'une complication cardiovasculaire (15 % à 3 ans) est presque aussi important que celui de progresser vers la "mort rénale" et la mise en dialyse (21 % à 3 ans).
4. Pourquoi les patients ayant une atteinte rénale ont-ils un RCVA aussi élevé ?
Plusieurs hypothèses, non mutuellement exclusives, peuvent être évoquées :
- prévalence particulièrement élevée des facteurs de risque vasculaire classiques dans cette population
- présence d'autres facteurs de risque vasculaire plus ou moins identifiés et spécifiques de l'urémie
- comorbidités associées (néphropathies diabétique et vasculaire)
- spécificités liées au syndrome néphrotique ? (dyslipidémie, état pro-thrombotique) et/ou aux traitements immunosuppresseurs ? (glucocorticoïdes, cyclosporine).
Les facteurs de risque vasculaire "classiques" sont-ils plus prévalents chez les malades avec une atteinte rénale ?
L'hypertension artérielle est fréquente, retrouvée chez 80 % des patients au stade d'insuffisance rénale avancée. A ce stade, la composante de rétention hydrosodée est fréquente mais souvent mal appréciée (les diurétiques sont souvent utilisées à doses prudentes par crainte de l'insuffisance rénale fonctionnelle). Cette inflation hydrosodée même latente semble déterminante dans l'absence de baisse tensionnelle nocturne ("non-dipper") qui elle-même joue un rôle important dans la constitution d'une hypertrophie ventriculaire gauche. L'augmentation de la pression pulsée est particulièrement fréquente chez l'urémique et ses conséquences sur le système artériel, l'hypertrophie ventriculaire gauche et la consomation d'O2 myocardique ont été revues récemment. En fait l'HTA est fréquente aussi chez des patients sans insuffisance rénale atteints de polykystose rénale ou de diverses glomérulonéphrites.
De plus l'HTA joue un rôle essentiel sur la progression de la plupart des maladies rénales (20). L'étude MDRD montre que l'obtention de chiffres tensionnels normaux bas est possible, bien tolérée et réduit la vitesse de progression (surtout la néphropathie avec protéinurie > 3 g/24 h) et l'incidence des hopitalisations pour complications vasculaires (20,21). Dans l'étude HOT, la baisse tensionnelle obtenue par un traitement antihypertenseur "classique" (dihydropyridine en première intention) est équivalente chez les patients avec ou sans insuffisance rénale mais une augmentation du nombre d'antihypertenseurs est cependant nécessaire pour atteindre les valeurs cibles fixées (22).
L'HVG électrique est un prédicteur puissant du risque de morbi-mortalité cardio-vasculaire dans l'étude de Framingham (1). L'HVG échographique est extrêmement fréquente chez l'insuffisant rénal : la prévalence atteint 75-80 % des patients au moment de la mise en dialyse (23). La prévalence de l'HVG augmente cependant parallèlement à la réduction de fonction rénale, à la pression artérielle systolique et au degré d'anémie (24,25). L'HVG peut cependant être détectée encore plus précocément chez des sujets ayant une polykystose rénale ou une glomérulonéphrite à fonction rénale normale et faiblement hypertendus (18,19). Chez l'urémique l'augmentation de la masse ventriculaire gauche traduit surtout un excès de fibrose intercardiomyocytaire avec des conséquences sur la dysfonction diastolique et l'hyperexcitabilité ventriculaire. L'HVG chez l'urémique est probablement multifactorielle : hypertension artérielle, anémie, rôle possible du "milieu urémique" et de l'hyperparathyroidie. La valeur prédictive de l'HVG sur la mortalité cardio-vasculaire chez l'urémique non dialysé est probablement forte, comme chez le dialysé, mais n'a pas été formellement démontrée ni quantifiée dans cette population.
La dyslipidémie est fréquente chez les sujets ayant soit une insuffisance rénale soit une protéinurie. L'hypertriglycéridémie est plus fréquente chez l'urémique alors que l'hypercholestérolémie prédomine chez les patients ayant une protéinurie abondante (de rang néphrotique) (26). Ces désordres lipidiques ont longtemps été négligés parce que leur valeur pronostique à long terme n'était pas bien connue (27). De plus le maniement des hypolipémiants est compliqué par l'insuffisance rénale (risque de rhabdomyolyse) et la baisse du cholestérol obtenue par traitement avec une statine (-25 % en moyenne) ne permet pas toujours de normaliser les hypercholestérolémies parfois très importantes associées au syndrome néphrotique. Enfin les traitements immuno-suppresseurs (glucocorticoïdes et cyclosporine) peuvent majorer les anomalies lipidiques. L'excès de risque cardio-vasculaire lié à la présence d'un syndrome néphrotique n'est pas définitivement établi mais fortement suggéré par une étude cas-témoins.
Il est cependant intéressant de noter que les anomalies lipidiques ne sont pas "tardives" rencontrées seulement au stade de syndrome néphrotique ou d'urémie avancée. Une étude néo-zélandaise chez 5670 sujets agés de plus de 40 ans rapporte ainsi une relation directe entre l'excrétion urinaire d'albumine (< 300 mg/24h), la pression artérielle diastolique et la cholestérolémie (29). Dans l'hypertension artérielle "essentielle", la microalbuminurie est aussi associée à une hyperlipidémie et une insulino-résistance (30). Il a été suggéré que la microalbuminurie dans cette circonstance pourrait ne représenter que l'expression rénale d'une dysfonction endothéliale généralisée, ce qui expliquerait sa valeur prédictive sur la morbi-mortalité cardiovasculaire (31).
Enfin certains facteurs de risque (qui ne sont pas pris en compte dans les équations de Framingham) semblent particulièrement fréquents et importants chez les malades urémiques (revue dans 17). Parmi ces facteurs, citons l'accumulation de LDL oxydées et/ou modifiées par les AGE (32), l'hyperhomocystéinémie (33) ou l'hyperparathyroidie secondaire et les calcifications vasculaires (17). La contribution respective de ces différents facteurs est vraisemblable mais n'est pour le moment pas formellement établie et ne le sera qu'à la suite de longues études d'interventions.
5. Les équations de Framingham sont -elles applicables en néphrologie ?
Les données de deux publications précédantes sont suffisantes pour calculer pour le groupe total le risque d'évènement coronarien ou cérébral à partir des équations issues de Framingham (1,2) et de PCV-Metra (34) (voir la page "Risque cardio-vasculaire absolu").
Dans l'étude de Göteborg (6), l'incidence réelle observée d'évènements à 10 ans est de 12% chez les hypertendus sans protéinurie, et augmente à 23% chez les hypertendus fumeurs. Les équations de Framingham sont applicables car les sujets sont pratiquement tous indemmes de lésions au début de l'étude. Le calcul du risque par les équations de Framingham donne 20% à 10 ans dans le groupe sans protéinurie (15% d'accidents coronaires + 5% d'accidents cérébraux) et 31% chez les fumeurs (22% d'accidents coronaires + 9% d'accidents cérébraux); les équations de Framingham sont donc plus pessimistes que la réalité. Par contre si l'on utilise l'équation de Laurier proposée pour l'évaluation du risque coronaire en France (34), on retrouve 13% d'évènements combinés (8% d'accidents coronaires + 5 % d'accidents cérébraux) chez les hypertendus sans protéinurie et 23 % (14% d'accidents coronaires + 9% d'accidents cérébraux) chez les hypertendus fumeurs. La Suède semble donc plus proche de la France que Framingham...!
Chez les patients hypertendus protéinuriques il existe un net excès de morbidité cardio-vasculaire, avec un risque relatif d'environ 3 (compte tenu du fait que les résultats sont ajustés pour l'ensemble des autres paramêtres).
Dans l'étude suédoise d'Agewall (10), l'incidence observée d'évènements est respectivement de 42 % à 3.3 ans (25% d'accidents coronaires et 17 % d'accidents cérébraux) dans le groupe "macro"albuminurique et 9% (6% d'accidents coronaires + 3% d'accidents cérébraux) dans le groupe normoalbuminurique. Le risque prédit par les équations de Framingham est de 36% à 4 ans (28 % d'accidents coronaires +8 % d'accidents cérébraux) dans le groupe macroalbuminurique et 13% dans le groupe normoalbuminurique et se rapproche donc de l'incidence observée. En fait, dans cette étude 25% des patients macroalbuminuriques et 11% des patients normoalbuminuriques ont déjà un antécédent coronarien ou cérébral en début de suivi et ne sont donc pas en situation de prédiction primaire du risque (voir la page "Risque cardio-vasculaire absolu"). La préexistence d'évènements symptomatiques en début de suivi explique probablement l'incidence élevé d'évènements ultérieurs dans cette étude. Il est donc difficile de conclure si l'excès de risque associé à la macroalbuminurie est lié à cette prévalence plus élevée d'antécédents (macroalbuminurie comme "indicateur" de risque) ou si la macroalbuminurie constitue réellement un marqueur prédictif du risque ultérieur chez des individus sans atteinte vasculaire préalable.
6. Conclusions
En dépit d'une prévalence assez faible, la présence d'une protéinurie même minime (c'est-à-dire 100-200 mg/dl ou par 24h) ou d'une insuffisance rénale même modérée (créatinine plasmatique à 130-150 µmol/l) confère un excès de risque en terme de morbidité et de mortalité totale et cardio-vasculaire. Cet excès de risque est particulièrement net chez des patients hypertendus mais semble aussi exister chez les malades normotendus au moins dans la tranche d'âge de 50-80 ans. Le RCVA de morbidité chez les patients ayant une atteinte rénale est d'environ 40 % à 10 ans alors que le seuil de morbidité considéré comme seuil d'intervention par les plus conservateurs des experts internationaux est de 20 % à 10 ans.
L'excès de morbidité-mortalité cardio-vasculaire semble lié d'une part à une prévalence plus importante des facteurs de risque vasculaires classiques de l'athérome mais aussi à des facteurs de risque plus récemment identifiés et particulièrement prévalents au cours de l'urémie.
En raison de cet excès de morbidité-morbidité non expliqué par la prévalence des facteurs de risque traditionnels, les équations de Framingham-PCV-Metra ne semblent pas directement applicables au patients ayant une atteinte rénale.
D'autre part, l'atteinte rénale semble avoir une signification multiple : il s'agit un indicateur du risque actuel chez certains patients (ayant déjà fait des complications cardio-vasculaires); chez d'autres patients l'atteinte rénale constitue surtout un prédicteur du risque ultérieur.
L'amélioration de la prise en charge des patients ayant une atteinte rénale passe indicutablement par l'évaluation et le traitement des facteurs de risque et/ou des atteintes cardio-vasculaires associées. L'importance du risque rapportée ci-dessus suscite donc des interrogations sur l'opportunité d'une intervention multi-factorielle systématique chez tous les patients protéinuriques et/ou insuffisants rénaux sur l'ensemble des facteurs de risque vasculaire (pression artérielle, cholestérol, etc...).
|