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Potassium : Diagnostic de l’Hypokaliémie
jeudi 5 octobre 2000








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OBJECTIFS

-  Savoir définir une hypokaliémie et connaître les principales complications associées

-  Connaître la démarche diagnostique devant une hypokaliémie

-  Connaître les principales causes d’hypokaliémie et leurs caractéristiques diagnostiques

Généralités

L’hypokaliémie est définie par une diminution de la concentration plasmatique de potassium inférieure à 3,5 mmol/l. L’hypokaliémie est l’une des anomalies hydroélectrolytiques les plus fréquemment rencontrées en médecine clinique.

Conséquences et complications de l’hypokaliémie

La plupart des patients avec une hypokaliémie chronique sont asymptomatiques et la concentration plasmatique de potassium abaissée est découverte par hasard sur un examen sanguin systématique.

Lorsque la concentration plasmatique de potassium descend au-dessous de 3 mmol/l, peuvent survenir une faiblesse musculaire, induite en partie par les modifications du potentiel de membrane de repos, une polyurie- polydypsie liées à une résistance tubulaire à l’hormone antidiurétique.

L’hypokaliémie peut également prédisposer à des modifications électrocardiographiques, comme une dépression du segment ST, un aplatissement de l’onde T et l’apparition d’une onde U ainsi que diverses arythmies cardiaques en particulier chez les patients prenant des digitaliques ou ayant une insuffisance coronaire aiguë. Dans ce dernier contexte, la libération d’adrénaline par le stress peut contribuer à aggraver l’hypokaliémie. L’hypokaliémie augmente à la fois l’automaticité et le délai de repolarisation. Il en résulte divers types d’arythmie, notamment une ectopie ventriculaire prématurée, un bloc atrio-ventriculaire et même une tachycardie ou une fibrillation ventriculaire.

voir la figure "Apparition d’une onde U (après l’onde T) et pseudo-allongement de QT caractéristique des modifications ECG de l’hypokaliémie".

voir la figure Modifications séquentielles de l’ECG selon le degré d’hypokaliémie (voir texte).

Outre le risque d’arythmie ventriculaire déjà évoqué, l’hypokaliémie peut favoriser l’augmentation de pression artérielle. L’effet antihypertenseur des diurétiques thiazidiques est diminué par l’hypokaliémie et majoré par la réplétion potassique. De plus, la pression artérielle semble davantage sodium-dépendante en présence d’une hypokaliémie. Selon la dose et l’apport sodé jusqu’à 50 % des patients traités par diurétiques, notamment de longue durée d’action et thiazidiques peuvent développer une hypokaliémie en-dessous de 3,5 mmol/l. Malgré le bénéfice du traitement de l’hypertension artérielle, l’hypokaliémie induite par les diurétiques peut avoir des conséquences importantes en majorant le risque de mort subite chez les hypertendus traités par diurétiques thiazidiques en l’absence de diurétiques épargneurs du potassium.

L’hypokaliémie altère à la fois la libération d’insuline et la sensibilité à l’insuline des organes-cibles ce qui aggrave l’hyperglycémie chez les patients diabétiques.

La déplétion potassique aboutit à diverses anomalies neuromusculaires. L’hypokaliémie polarise les cellules musculaires squelettiques en diminuant la capacité de contraction. La déplétion potassique diminue également le débit sanguin aux muscles squelettiques, ce qui peut prédisposer à la rhabdomyolyse, notamment en cas d’exercice intense. Ces différents effets aboutissent à une faiblesse musculaire, une fatigabilité, à la survenue de crampes et de myalgies. Une paralysie est plus inhabituelle mais peut survenir en cas de déficit potassique très profond.

L’hypokaliémie affecte de façon importante l’homéostasie acido-basique. L’hypokaliémie entraîne une alcalose métabolique en stimulant la réabsorption tubulaire proximale de bicarbonate et l’ammoniogénèse et en diminuant l’excrétion urinaire de citrate. L’hypokaliémie entraîne une acidification intracellulaire et inhibe la sécrétion d’aldostérone. Dans certains cas (acidose tubulaire rénale), une hypokaliémie sévère aboutit à une paralysie musculaire respiratoire et au développement d’une acidose respiratoire.

Une hypokaliémie entraîne souvent une polyurie modérée de 2 à 3 litres par jour liée à la fois à une augmentation de la soif et à un diabète insipide néphrogénique modéré.

L’hypokaliémie chronique et sévère en association avec un hyperaldostéronisme peut aboutir à la formation de kystes rénaux. Ces kystes développés aux dépens de l’épithélium du tube collecteur sont souvent associés à des cicatrices interstitielles. La correction de l’hypokaliémie fait régresser les kystes. En augmentant l’ammoniogénèse et l’accumulation médullaire d’ammonium, l’hypokaliémie stimule l’activation du système complémentaire (formation de C3-amidé) générateur d’inflammation et de fibrose interstitielle. Au moins expérimentalement, une supplémentation en bicarbonate diminue l’ammoniogénèse et réduit la fibrose interstitielle associée à l’hypokaliémie indépendamment des modifications du potassium sérique.

voir la figure Néphropathie hypokaliémique au stade initial : fines vacuoles dans les cellules tubulaires proximales. (H & E x 480)

voir la figure Néphropathie hypokaliémique : stade tardif avec de larges vacuoles intracytoplasmiques déplacant les noyaux. (H & E x 430)

L’hypokaliémie contribue au développement ou aggrave les symptômes de l’encéphalopathie hépatique. L’hypokaliémie en effet augmente l’ammoniogénèse dans le tube proximal et 50 % environ de cette production repasse dans la circulation systémique sous la forme d’ammoniaque. En cas d’insuffisance hépatique, la quantité d’ammoniaque est suffisante pour développer ou aggraver les symptômes d’encéphalopathie hépatique.

Causes des hypokaliémies

    1) Diminution de l’apport alimentaire

L’apport alimentaire normal en potassium est d’environ 1 mmol/kg/jour davantage en cas d’alimentation riche en légumes et en fruits. L’adaptation rénale à la conservation du potassium permet d’excréter un minimum de 5 à 25 mmol/jour, même en présence d’une déplétion potassique sévère. Une hypokaliémie liée à un apport alimentaire insuffisant en potassium n’est donc pas possible en-dehors d’une cause supplémentaire de pertes potassiques, comme un traitement diurétique ou un régime hypocalorique riche en protéines pour une perte de poids (régime amaigrissant rapide).

    2) Hypokaliémie de redistribution

    a) Alcalose

L’alcalose, soit métabolique, soit respiratoire, favorise la rentrée de potassium dans les cellules. Cet effet direct de l’élévation du pH extracellulaire est relativement modéré avec une baisse de la concentration plasmatique de potassium de - 0,4 mmol/l pour chaque augmentation de 0,1 Unités pH. Cependant l’hypokaliémie est très souvent associée à l’alcalose métabolique probablement parce que le mécanisme de la maladie sous-jacente (diurétiques, vomissements, hyperaldostéronisme) induit à la fois une perte urinaire de protons et de potassium.

    b) Hyperinsulinisme

L’insuline fait rentrer le potassium dans les cellules musculaires squelettiques et les cellules hépatiques en augmentant l’activité de la pompe Na-K-ATPase. Cet effet est particulièrement marqué avec l’administration d’insuline chez des patients en acidocétose diabétique ou avec une hyperglycémie importante sans cétose.

    c) Hyperactivité béta-adrénergique

Les catécholamines agissant via les récepteurs béta 2 adrénergiques font rentrer le potassium dans les cellules en augmentant l’activité de la Na-K-ATPase. Une hypokaliémie transitoire peut être observée dans toute situation s’accompagnant d’une hyperadrénergie induite par le stress, comme au cours des maladies aiguës, de l’ischémie coronaire ou de l’intoxication à la théophylline. De même l’administration d’agonistes béta-adrénergiques tels que l’albutérol, la terbutaline ou la dopamine utilisés pour traiter l’asthme, l’insuffisance cardiaque ou prévenir un accouchement prématuré peuvent induire une hypokaliémie de plus de 0,5 à 1 mmol/l. Cet effet hypokaliémiant de l’adrénaline peut être bloqué par un bétabloqueur non sélectif mais inversement un bétabloqueur sélectif béta 1 ne confère aucune protection.

    d) Paralysie périodique hypokaliémique

Il s’agit d’une maladie rarissime caractérisée par des épisodes de paralysie ou de faiblesse musculaire pouvant toucher les muscles respiratoires et donc avec un risque léthal potentiel. Au cours des poussées aiguës déclenchées par le repos après un exercice, le stress ou un repas riche en glucides, la kaliémie peut descendre jusqu’à 1,5 à 2,5 mmol/l. La paralysie périodique hypokaliémique peut être soit génétique, soit acquise.
Dans la forme génétique, transmise selon un mode autosomique dominant, il existe dans la plupart des cas une mutation ponctuelle sur la sous-unité alpha 1 du canal calcium sensible aux dihydropyridines du muscle squelettique. La mutation de ce canal aboutit à une augmentation du calcium intracellulaire mais le lien entre ce phénomène et l’hypokaliémie reste mal éclairci.
La forme acquise s’observe chez des patients hyperthyroïdiens, notamment d’origine asiatique et de sexe masculin. L’hormone thyroïdienne augmente l’activité de la NaK-ATPase et l’hyperthyroïdie pourrait chez certains sujets susceptibles (mutation d’un canal calcium ?) favoriser l’expression phénotypique d’une anomalie génétique sous-jacente.
Le traitement fait appel à l’administration de 60 à 120 mmol de chlorure de potassium qui permet habituellement de corriger une poussée aiguë en l’espace de 15 à 20 minutes. L’administration d’un bétabloqueur non sélectif est indiquée à la fois dans la forme génétique et acquise.

    e) Anabolisme cellulaire

L’anabolisme cellulaire intense, notamment des cellules hépatopoïétiques s’accompagne d’une captation de potassium et d’une hypokaliémie. Cette circonstance est plus fréquemment observée au cours de l’administration de vitamine B12 ou d’acide folique pour traiter une anémie mégaloblastique ou de l’administration de GMCSF pour traiter une neutropénie.
Certaines cellules métaboliquement actives peuvent également capter le potassium après que le sang ait été prélevé. Ceci se voit au cours des leucémies myéloïdes aiguës avec une hyperleucocytose importante. Dans ce cas, la concentration mesurée plasmatique de potassium peut être artificiellement abaissée de 1 mmol/l si le sang est conservé à la température ambiante.

    f) Intoxications

L’intoxication au baryum et par la chloroquine peut causer une hypokaliémie sévère inférieure à 2 mmol/l pour la chloroquine. Ces médicaments bloquent les canaux potassium de la membrane cellulaire.

    3) Augmentation des pertes intestinales de potassium

Les pertes de liquide gastrique ou intestinal de toutes causes (vomissements, diarrhées, laxatifs, drainage digestif) sont associées à une perte de potassium et une hypokaliémie. La concentration de potassium dans les liquides digestifs bas est relativement élevée, 20 à 50 mmol/l. L’origine digestive de l’hypokaliémie rend compte d’une kaliurèse basse et d’un GTTK également effondré.
Inversement la concentration en potassium du liquide gastrique est seulement de 5 à 10 mmol/l et la déplétion potassique dans ce contexte est essentiellement liée à une perte urinaire de potassium. En effet, la soustraction de liquide gastrique acide induit une alcalose métabolique et la fuite urinaire de potassium. Un élément diagnostique est la concentration abaissée de chlore urinaire dans ce contexte.

Les pertes liquidiennes du tractus gastro-intestinal bas sont riches à la fois en bicarbonate et en potassium, ce qui est responsable habituellement d’une acidose métabolique tout du moins en aigu. Chez les patients ayant des diarrhées induites ou en cas d’abus de laxatifs plus ou moins occulte ou chez les patients ayant des diarrhées prolongées sur des périodes importantes par exemple à la suite d’un adénome villeux ou d’une tumeur sécrétant du VIP (vipome), l’acidose métabolique peut être au contraire remplacée par une alcalose métabolique hypokaliémique. Dans ce cas, l’alcalose est attribuée à la contraction volémique induite par les déplétions prolongées.

L’hypokaliémie secondaire à un abus de laxatifs peut être parfois difficile à mettre en évidence d’autant qu’elle s’associe parfois à un abus de diurétiques. La recherche de diurétiques dans les urines et une sigmoïdoscopie à la recherche d’une mélanose colique peut s’avérer utile chez les patients prenant des laxatifs de type antracène pendant plus de 4 mois. En cas de laxatif phénolphtaléine, l’alcalinisation des selles produit une couleur rose. Avec les catartiques contenant du magnésium ou du phosphate, la mesure directe de ces composés dans les selles peut confirmer le diagnostic.

    4) Hypokaliémie par fuite urinaire

    a) L’association d’une hypokaliémie avec fuite urinaire de potassium et hypertension artérielle doit faire évoquer en priorité un hyperminéralocorticisme.

    voir la figure "Biosynthèse des stéroides surrénaliens : minéralocorticoides, glucocorticoides et androgènes. Les letres ou chiffres cerclés représentent les enzymes spécifiques : DE : cholestérol desmolase ; 3ß : 3ß-ol-deshydrogénase ; 17 : 17a-hydroxylase ; 11 : 11ß-hydroxylase ; 21 : 21-hydroxylase ;
  • L’hyperminéralocorticisme peut être primitif lié à l’excès de production d’un minéralocorticoïde actif généralement l’aldostérone par une tumeur surrénale, adénome de Conn le plus souvent, carcinome parfois. L’hypertension est dans ce cas induite par la rétention hydrosodée avec freination de la sécrétion de rénine et d’angiotensine II.
    voir la figure Adénome surrénalien de Conn de 1. cm. Cette lésion représente environ 2/3 des cas d’hyperaldostéronisme primitif. Ces adénomes ont typiquement une taille inférieure à 2 cm et une section de couleur jaune.

  • L’hyperaldostéronisme secondaire à l’activation du système rénine-angiotensine s’observe au cours de diverses formes d’hypertension comme l’hypertension artérielle maligne, l’hypertension rénovasculaire et les rarissimes tumeurs sécrétant de la rénine (réninome).
    voir la figure Défaut cortical correspondant à une tumeur sécrétrice de rénine
    voir la figure Réninome : coloration en brun par l’immunoperoxydase anti-rénine de l’ensemble des cellules de cette tumeur juxta-glomérulaire.

  • Plus rarement des anomalies génétiques sont responsables d’un tableau d’hyperminéralocorticisme avec hypertension artérielle, hypokaliémie par fuite urinaire de potassium. Dans l’hyperaldostéronisme sensible aux glucocorticoïdes (GRA), l’aldostérone est fabriqué par un gène chimérique placé anormalement sous la dépendance de l’ACTH et non plus de l’angiotensine II. L’hyperplasie congénitale surrénalienne, l’absence de 11 béta-hydroxylase ou de 17 alpha-hydroxylase induit un excès de CRH hypothalamique et à la synthèse persistante de 11 desoxycorticostérone, un minéralocorticoïde puissant. Ces anomalies rares sont habituellement suspectées sur les effets associés des stéroïdes sexuels. Dans le déficit en 11 béta-hydroxylase, la production augmentée d’endrogène induit une virilisation précoce chez l’homme et la femme. Au cours du déficit en 17 alpha-hydroxylase, le bloc enzymatique inhibe la formation des hormones sexuelles et aboutit à l’absence de différenciation sexuelle.

  • Exceptionnellement les glucocorticoïdes peuvent agir comme minéralocorticoïde et être responsable d’hypertension avec hypokaliémie.
    Dans le syndrome d’excès apparent en minéralocorticoïde de type 1 (AME 1), la 11 béta-hydroxystéroïde déshydrogénase (11-HSD) est génétiquement inactive. Cet enzyme convertit normalement le cortisol (actif sur le récepteur aux minéralocorticoïdes) en cortisone (inactive sur ce récepteur). Ce mécanisme de protection prérécepteur permet d’assurer la sélectivité de l’action des minéralocorticoïdes au niveau du tube collecteur cortical en présence de quantité élevée de glucocorticoides. L’absence de 11-bétahydroxystéroïde déshydrogénase active permet au cortisol d’accéder au récepteur et de fonctionner comme un puissant minéralocorticoïde au niveau du néphron distal, favorisant la rétention sodée et l’excrétion de potassium.
    Certains médicaments comme par exemple l’acide glycérétinique présent dans la carbénoxolone, le tabac à mâcher et le réglisse sont capables d’inhiber la 11-ß-HSD et sont responsables d’un tableau acquis d’AME.
    Enfin, le cortisol endogène circulant peut parfois dépasser les capacités métaboliques de la 11-ß-HSD. Cette situation s’observe dans les maladies de Cushing sévères ou les syndromes de production ectopique d’ACTH avec un hypercortisolisme endogène majeur.

  • Une maladie génétique rare est responsable d’hypertension artérielle avec hypokaliémie par fuite rénale. Cette maladie transmise sur un mode autosomique dominant est particulière par l’absence mesurable de tout minéralocorticoïde et un système rénine-angiotensine effondré et non stimulable ("pseudo-hyperaldostéronisme"). Ce syndrome de Liddle est lié à l’existence d’une mutation activatrice d’une des sous-unités du canal sodium épithélial présent dans le tube collecteur cortical et favorisant la réabsorption de sodium en échange de potassium, ce qui explique la rétention hydrosodée et l’excrétion de potassium. La mutation est responsable d’une augmentation de la probabilité ouverture de ce canal sodium épithélial et explique l’expansion volémique, l’hypertension artérielle et la fuite urinaire de potassium liée à l’augmentation de l’électronégativité luminale.



    b) Hypokaliémie avec fuite urinaire de potassium sans hypertension ou tendance à l’hypotension

  • La présence dans le tube collecteur cortical d’anions non réabsorbables majore le gradient électronégatif luminal et favorise la sécrétion de potassium. Cette situation s’observe lorsqu’il existe au niveau du néphron distal des quantités relativement importantes d’un anion non réabsorbable y compris le bicarbonate au cours des vomissements ou l’acidose tubulaire de type 2, le béta-hydroxybutyrate au cours de l’acidocétose diabétique, l’hippurate au cours de l’intoxication au toluène ("sniffage" de colle) ou enfin un dérivé de la pénicilline chez des patients recevant de fortes doses de pénicilline.
    Dans tous ces contextes, la plupart du sodium délivré au tube distal est réabsorbé en échange de 1 potassium aboutissant à une sécrétion marquée de potassium. L’effet hypokaliémiant des anions non réabsorbables est beaucoup plus marqué lorsqu’il existe une déplétion volémique associée. Dans cette situation en effet, la réabsorption proximale augmentée diminue le débit distal de chlore délivré au tube collecteur et d’autre part l’augmentation de sécrétion d’aldostérone favorise la sécrétion de potassium.
    A noter que dans ces situations où l’hypokaliémie est liée à un anion faiblement réabsorbable et associée à une acidose métabolique, le degré de déplétion potassique est masqué par la tendance à l’acidose qui fait sortir le potassium des cellules. Dans ce cas, la correction de l’acidose va mettre en évidence le réel niveau de balance potassique.

  • L’hypomagnésémie est présente jusque chez 40 % des patients avec une hypokaliémie. Dans de nombreuses situations (traitement diurétique, vomissements, diarrhées) il y a une perte à la fois de potassium et de magnésium. De plus, l’hypomagnésémie quelle qu’en soit la cause peut entraîner une fuite urinaire de potassium par un mécanisme encore mal connu. La mise en évidence d’une hypomagnésémie dans ce contexte est particulièrement importante car l’hypokaliémie ne peut généralement pas être corrigée tant que le déficit en magnésium n’est pas lui-même corrigé. La présence d’une hypocalcémie associée liée à la fois à la diminution de la libération de l’hormone parathyroïdienne et à une résistance à ses effets hypercalcémiants est souvent le témoin d’une déplétion magnésique sous jacente.
    L’hypomagnésémie semble expliquer l’hypokaliémie associée à différentes tubulopathies, notamment induites par les aminoglycosides ou par l’amphotéricine B. L’hypokaliémie survient chez la moitié des patients traités par amphotéricine B. Celle-ci interagit avec les stéroïdes membranaires favorisant l’augmentation de perméabilité et la sécrétion de potassium à travers la membrane luminale. Une acidose tubulaire de type 1 associée peut également jouer un rôle favorisant.

  • Les néphropathies avec perte de sel rénale liées à une diminution de la réabsorption de sodium en amont du tube collecteur cortical entrainent souvent une hypokaliémie.
    Ceci est plus souvent observé au cours des traitements diurétiques notamment par les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique (acétazolamide, Diamox®), les diurétiques de l’anse (furosémide, Lasilix® ; bumétamide, Burinex®) et les diurétiques agissant dans le tube contourné distal (diurétiques thiazidiques).
    On peut rapprocher certaines maladies génétiques rares associant une alcalose métabolique avec contraction volémique, hypokaliémie avec fuite rénale et liée à des anomalies constitutives des protéines intervenant dans le transport vectoriel du sodium au niveau du tube distal. Le syndrome de Bartter s’associe à une hypercalciurie, parfois une hypermagnésurie et correspond à 3 types de mutations au niveau soit du gène du cotransporteur NaK2Cl, soit du gène de ROMK, soit du gène codant pour ClCNKB. Le syndrome de Gitelman est une variante correspondant à une mutation ponctuelle sur le gène codant pour NCCT correspondant au co-transport NaCl au niveau du tube distal. Ce syndrome correspond à une présentation analogue à celui d’une intoxication par diurétiques thiazidiques et associe une hypocalciurie, une hypomagnésémie et une présentation à un âge plus tardif.

    D’autres tubulopathies peuvent s’associer à une perte de sel et de potassium telles que les néphropathies interstitielles liées au syndrome de Sjögren ou au lupus, à l’hypercalcémie et les lésions tubulaires induites par le lysozyme chez des patients atteints de leucémie aiguë myélomonocytaire.
    On peut rapprocher de ces situations les syndromes polyuriques quelle qu’en soit la cause. Normalement la concentration minimale de potassium urinaire est de 5 à 10 mmol/l. Lorsque le débit urinaire est de 5 à 10 litres par jour, il s’ensuit des pertes obligatoires de potassium de 50 à 100 mmol/jour. L’hypokaliémie survient plus généralement au cours des polydipsies primitives (souvent psychogénique) au cours desquelles le débit urinaire peut être augmenté pendant des périodes de temps prolongées. Un degré similaire de polyurie est observé au cours du diabète insipide central mais dans ce cas les patients consultent généralement rapidement après le début de la polyurie.

  • Les pertes sudorales de potassium sont habituellement négligeables car le volume sudoral est faible et la concentration de potassium de 5 à 10 mmol/l. Au cours de l’exercice en climat chaud, le débit sudoral peut atteindre jusqu’à 10 litres ou plus par jour et aboutir à une déplétion en potassium si les pertes ne sont pas remplacées. En ce cas, l’excrétion urinaire inappropriée de calcium peut également contribuer en raison de la contraction volémique et de la stimulation de la libération d’aldostérone par l’exercice et les catécholamines.




    Post-scriptum :

    LECTURES RECOMMANDÉES

    -  Halperin ML, Kamel SK. Potassium.Lancet 1998 ;252:135

    -  Weiner DI, Wingo CS. Hypokalemia-Consequences, causes and correction. JASN 1997 ; 1180





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