AccueilPages Med.MedlineCalculsRecommand.Liens

OBJECTIFS

 
NephroHUS Online PLAN DU CHAPITRE

1. Généralités concernant le dépistage

1.1. Définition

Le dépistage est défini par la recherche chez un sujet asymptomatique dune maladie à un stade débutant où elle na pas dexpression clinique.

Le principe du dépistage repose sur les notions que le diagnostic précoce permet dinfluer sur lévolution de la maladie voire de la guérir, et que le coût du traitement est inférieur lorsquil est précoce. Le dépistage peut sadresser soit à la population générale (dépistage de masse), généralement peu rentable dans la mesure où il est souvent fait dans des cadres institutionnels chez des sujets à priori sains (médecine scolaire, universitaire, ou médecine du travail). Le dépistage peut sadresser à des sujets dits « à haut risque » en raison dun terrain favorisant particulier. Cest par exemple la recherche dune atteinte rénale chez des sujets à haut risque de développer ce type datteinte, par exemple les sujets diabétiques ou les sujets hypertendus.

Théoriquement, le dépistage ne se justifie que si certains critères sont satisfaits :

  • la maladie doit être suffisamment fréquente,
  • la maladie doit être grave ou potentiellement grave,
  • elle doit présenter un stade pré-symptomatique clairement différentiable de la normale,
  • il doit exister un traitement efficace administrable dès le stade initial,
  • des moyens diagnostiques et thérapeutiques complémentaires sont disponibles.

Le test de dépistage doit être lui-même fiable, acceptable et relativement économique. La décision dappliquer une méthode de dépistage systématique à un sous groupe ou à lensemble de la population, dépend donc de lévaluation du rappport coût / bénéfice attendu de ce dépistage.

1.2 Notion de fiabilité du test

Le test doit permettre didentifier les sujets atteints avec une marge derreur la plus faible possible : la sensibilité du test est laptitude à déceler la maladie chez un sujet réellement atteint, la spécificité est laptitude à donner des résultats négatifs pour les sujets indemnes. Le test de dépistage nest pas un outil diagnostique. Il doit seulement permettre didentifier des sujets chez lesquels il existe un risque élevé de trouver une anomalie par des examens de confirmation. Lexamen de confirmation permet de préciser à posteriori la spécificité du test. Lexamen de dépistage doit permettre, lorsquil est négatif, dexclure les patients indemnes (absence de faux négatifs). En pratique, une spécificité absolue, cest-à-dire labsence de faux négatifs, se fait souvent au détriment dun léger excès de sensibilité (faux positifs).

voir la figure Sous-ensembles de populations de sujets réellement atteints (ronds bleus clairs) et ceux supposés atteints par le dépistage (ronds blancs). Le test de dépistage A est meilleur que le test B même s'il est trop sensible parce qu'il ne méconnait aucun des sujets atteints (absence de faux négatifs contrairement au test B)


1.3. Bandelette urinaire et dépistage en néphrologie


La bandelette urinaire sinscrit complètement dans le cadre de ces examens permettant le dépistage à grande échelle dune atteinte rénale en raison de sa sensibilité, de sa simplicité, et de son coût relativement modeste.
La bandelettre urinaire devrait être utilisée de façon systématique en dépistage à tous les patients à hauts risques de pathologie rénale comme le recommande lensemble de Sociétés Savantes et lANAES.

Les bandelettes réactives urinaires sont actuellement très sensibles et détectent des valeurs à la limite de la normalité. En raison de cette extrême sensibilité, les bandelettes sont susceptibles de générer des faux positifs, dautant quen réalité en raison de la simplicité dutilisation, lutilisateur naccorde pas toujours la rigueur nécessaire à une manipulation apparemment banale. Cest cette grande sensibilité de la bandelette urinaire qui lui permet de jouer pleinement son rôle de dépistage. La bandelette urinaire a rempli son rôle lorsque sur la cohorte initiale des prélèvements urinaires, elle a permis déliminer en toute sécurité les urines « négatives ». Les réactions nettement positives sont généralement dans la plupart des cas, confirmées par les examens complémentaires ultérieurs. Les réactions traces, générées par de nombreux faux positifs mais aussi parfois dépister des sujets réellement atteints.


2. Examen par les bandelettes réactives

Celui-ci peut être réalisé aussi bien au cabinet du médecin que dans un centre de médecine préventive. Les bandelettes sont polyvalentes et permettent d'évaluer simultanément plusieurs paramètres (voir tableau).

2.1. Généralités :

Les bandelettes sont constituées par un support plastique rigide sur lequel sont fixées des plages réactives distinctes. Les zones réactives sont stables et prêtes à l'emploi. Ces bandelettes sont à usage unique et ne nécessitent aucun matériel de laboratoire particulier.

2.2. Précautions :

Les bandelettes doivent être conservées dans un flacon hermétique, clos à une température inférieure à 30°C mais jamais au réfrigérateur. Ces bandelettes ne doivent pas être exposées aux agents physiques (lumière solaire, chaleur), ni aux agents ou vapeur chimique. Il ne faut pas utiliser des bandelettes dont l'une des plages est décolorée ou au contraire noircie.
Il ne faut pas tester une urine qui serait restée à la température ambiante et donc rapidement contaminée par des bactéries extérieures. Pour le recueil de l'urine, il faut utiliser des récipients propres et bien lavés. Il ne faut pas utiliser de conservateur de l'urine. Toute contamination de la surface de travail et des flacons qui sont amenés à recevoir l'urine (détergent) doit être évitée. L'influence de médicaments ou de métabolites de médicaments sur le test n'est pas toujours connue. En cas de doute, il faut refaire le test après arrêt du traitement.

2.3. Mode d'emploi :

Obtenir une urine fraîche homogénéisée mais non centrifugée, c'est-à-dire après toilette génitale et en recueillant les urines du milieu de jet. Pour certains tests, comme la recherche de nitrite, la réponse est surtout valable sur les premières urines du matin.

La manipulation est simple : l'observateur retire une bandelette du flacon qui doit être immédiatement refermée. Il ne doit pas toucher les zones réactives avec ses doigts, il faut immerger brièvement la bandelette (une seconde au maximum dans l'urine) de manière à ce que toutes les zones réactives soient au contact de l'urine. La bandelette doit être égouttée en passant le bord de la bandelette contre le rebord du récipient. Le bord de la bandelette est tapoté brièvement une seconde environ sur une surface absorbante, la bandelette est maintenue en position horizontale pour empêcher toute interférence entre les plages réactives et/ou la contamination de l'urine par les doigts.
La lecture est faite en rapprochant la bandelette de l'échelle colorimétrique visuellement. Des appareils basés sur le principe de photomètre à réflexion peuvent permettre d'automatiser et permettent une évaluation plus objective des résultats. Dans tous les cas, le temps de lecture doit être rigoureusement observé. Avec les bandelettes actuelles, le temps de lecture est aux alentours de 60 secondes (60 à 120 secondes pour la détection des leucocytes).

voir la figure Utilisation de la bandelette
voir la figure Utilisation de la bandelette (suite)
voir la figure Lecture de la bandelette


2.4. Interprétation des plages pour les différents marqueurs :

  • pH : la zone réactive contient 2 indicateurs, habituellement le rouge de méthyl et le bleu de bromothymol. Les valeurs de pH mesurées vont de 5 à 9.

  • Glucose : le glucose est mis en évidence par une réaction spécifique à la glucose oxydase-peroxydase avec une limite de détection pratique de 0,4 g/l (soit 2,2 mmol/l). Le test est indépendant du pH urinaire et n'est pas influencé par la présence de corps cétoniques. L'influence de l'acide ascorbique est largement éliminée actuellement : pour une concentration en glucose de 1 g/l ou plus il n'y a pas de résultat faussement négatif. Par contre, des traces d'antiseptique (très oxydant) dans le récipient de l'urine peuvent conduire à des résultats faussement positifs pour le glucose.

  • Corps cétoniques : les corps cétoniques sont mis en évidence sur le principe de la réaction de Legal avec une limite de détection de l'acide acétyl-acétique de 0,05 g/l ou encore 0,5 mmol/l. Le test est moins sensible à l'acétone. Les phénylcétones et les phtaléines donnent des teintes rouges qui se distinguent toutefois nettement des couleurs violettes obtenues avec les corps cétoniques. Le captopril et le mesna (mercapto-2-éthane-sulfonate de sodium) et d'autres substances contenant des groupes sulfhydrile peuvent conduire à des résultats faussement positifs.

  • Leucocytes : le test met en évidence l'activité des estérases granulocytaires. L'hydrolyse d'un ester indoxylique par ces enzymes conduit à la formation d'indoxyle qui réagit avec un sel de diazonium et donne une couleur violette. La couleur de la zone réactive peut être classée sans équivoque après 60 secondes dans l'une des catégories : négatives, ou environ 10 à 25 leucocytes/µl. La lecture est cependant mieux appréciée après 2 minutes. Les bactéries, les trichomonas ainsi que les érythrocytes urinaires ne réagissent pas dans ce test. Le formaldéhyde (agent conservateur) et les médicaments contenant de l'imipénème, du méropénème et de l'acide clavulinique peuvent conduire à des réactions faussement positives. Si les échantillons d'urines sont fortement colorés, par exemple par la bilirubine ou la nitrofurantoïne, la couleur de réaction de la zone réactive peut être masquée par la coloration propre de l'urine. Une protéinurie abondante (plus de 5 g/l) ou une glucosurie (> 20 g/l) ralentissent la coloration de la zone réactive. De fortes doses quotidiennes de céphalexine et de gentamycine peuvent conduire à une atténuation de la couleur de réaction.

  • Nitrites : le test repose sur le principe de la réaction de Griess, spécifique des nitrites. Il met en évidence la conversion de nitrates en nitrites et donc indirectement la présence de germes nitrites positifs, habituellement des entérobactéries présentes dans l'urine. Une coloration rose à rouge de la zone réactive indique une bactériurie significative avec une limite de détection de 0,5 mg/l, soit 11 µmol/l. Ce test peut être faussé par un apport alimentaire important en nitrates (salaison, légumes verts). Inversement, il est faussement négatif lorsque le nombre de colonies est insuffisant dans l'échantillon. En pratique, un séjour prolongé de l'urine dans la vessie, 4 à 8 heures, est la condition pour atteindre un pourcentage de détection élevée. L'antibiothérapie doit être suspendue 3 jours avant le test. Des quantités importantes d'acide ascorbique (vitamine C) peuvent conduire à des résultats par défaut ou faussement négatifs pour les nitrites. Les substances qui deviennent rouges en milieu acide, par exemple la phénazopyridine peuvent conduire à des résultats faussement positifs ou à une coloration rougeâtre de la zone réactive pour les nitrites.

  • Protéines : le test est basé sur le principe de l'erreur protéique des indicateurs de pH. Le test est particulièrement sensible à l'albumine avec une limite de détection de 60 mg/l mais il n'a qu'une faible détection pour les autres fractions protéiques, notamment les globulines et les chaînes légères d'immunoglobuline. La quinine, la quinidine, la chloroquine et le tolbutamide ainsi qu'un pH élevé jusqu'à 9 n'influencent pas le test. Par contre des résultats faussement positifs peuvent être induits à la suite de perfusions de polyvinylpyrolidone (succédané du plasma sanguin) ou s'il reste des traces d'antiseptique à groupement ammonium quaternaire ou de chloréxidine dans le récipient de recueil de l'urine. Les substances qui deviennent rouges en milieu acide, par exemple la phénazopyridine peuvent conduire à des résultats faussement positifs ou à une coloration rougeâtre de la zone réactive pour les nitrites et les protéines.


  • Sang : l'hémoglobine et la myoglobine catalysent l'oxydation de l'indicateur par l'hydropéroxide organique contenu dans la zone réactive. Les bandelettes actuelles comportent 2 échelles colorimétriques distinctes, l'une pour les érythrocytes, l'autre pour l'hémoglobine. Des points verts plus ou moins denses sur la zone réactive jaune indiquent la présence d'érythrocytes intacts avec une limite de détection pratique de 5 érythrocytes par µl. L'hémoglobine, les érythrocytes lysés et la myoglobine sont mis en évidence par une coloration verte homogène de la zone réactive avec une limite de détection de l'hémoglobine correpondant à 10 érythrocytes/µl. Des traces d'antiseptique (très oxydant) dans le récipient de l'urine peuvent conduire à des résultats faussement positifs pour le sang.

2.5. Validité


L'examen par bandelettes multiréactives est un moyen commode de dépister les principales anomalies cytologiques ou biochimiques de la composition de l'urine. Par principe, aucun diagnostic ou traitement ne doit être établi sur la base du résultat d'un test isolé.

Un examen pratiqué dans des conditions rigoureuses et qui se révèle totalement négatif permet d'exclure raisonnablement une protéinurie significative, une hématurie ou une leucocyturie et permet de ne pas prescrire d'examens cytobactériologiques urinaires en l'absence de contexte clinique évocateur.

Inversement toute anomalie de l'examen par les bandelettes impose une confirmation et des précisions par des examens biologiques appropriés obligatoirement réalisés au laboratoire.

Il convient aussi de rappeler que la bandelette détecte une éventuelle anomalie de concentration dune substance dans lurine. Des interprétation érronées peuvent être liées au débit urinaire variable dun individu à lautre. Ainsi par exemple, la détection de la protéinurie par la bandelette, permet de dépister une concentration dalbumine urinaire denviron 50 à 60 mg/l. Une telle concentration (et donc un virage de la bandelette à 1 +) peut être obtenue pour une protéinurie physiologique (< 150 mg/jour) sur des urines très concentrées. Inversement une protéinurie pathologique et peu abondante, par ex. 500 mg/j peut ne donner quune réactivité faible (traces) si les urines sont très diluées en raison dune diurèse > 3 litres par jour.


Pr T.Hannedouche


LECTURES RECOMMANDÉES

 

TEXTES COMPLÉMENTAIRES DANS LE SITE

Mise-à-jour : mardi 1 mai 2001

Copyright © Tous Droits Réservés pour le site entier Nephrohus 2001