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La néphroangiosclérose dite "bénigne" est définie par une lésion histologique non spécifique généralement attribuée à une hypertension artérielle.
1. Histologie (diagnostic positif)
La néphroangiosclérose est constitué primitivement de lésions vasculaires à type dépaississement intimal et de rétrécissement de la lumière des artères de petit calibre (arquées et interlobulaires) et des artérioles préglomérulaires. Lhypertrophie médiale (diminution du nombre de myocytes et des fibres musculaires lisses, remplacés par des fibres collagènes non élastiques) et lépaississement intimal fibro-élastique sont habituellement considéré comme une réponse hypertrophique à lhypertension chronique permettant de limiter la fraction de pression systémique transmise dans le glomérule. Les dépots de matériel hyalin (des protéines plasmatiques transsudées) traduisent laugmentation de perméabilité dans la paroi artériolaire endomagée.
Des lésions glomérulaires de type hyalinose segmentaire et focale initialement puis glomérulosclérose globale et diffuse peuvent être associées aux lésions vasculaires en particulier chez les sujets noirs. Les lésions vasculaires oblitérantes sont plutot responsables dune ischémie et dune rétraction glomérulaire. La hyalinose pourrait dans ce cas compliquer lhypertrophie-hyperperfusion glomérulaire secondaire à la réduction néphronique. Lhypertrophie glomérulaire préexistante, un nombre de néphron fonctionnel réduits (anomalie du développement rénal, petit poids de naissance lié à une malnutrition maternelle, chez les sujets noirs en particulier) pourrait dans ce cas jouer un rôle prédisposant important.
Les lésions tubulo-interstitielles associées sont souvent sévères : atrophie tubulaire et fibrose interstitielle parsemée dinfiltrats inflammatoires.
2. Diagnostic différentiel et présentation
La néphroangiosclérose est une lésion histologique non spécifique qui peut être observée au cours de diverses maladies vasculaires rénales avec ou sans hypertension.
Chez des femmes ayant un syndrome vasculo-rénal de la grossesse et qui nont été hypertendues que quelques jours ou semaines en fin de grossesse, la PBR post-partum a montré dans certains cas des lésions de néphroangiosclérose alors que ces femmes nétaient plus hypertendues ni protéinuriques. Ceci suggère que les lésions vasculaires préexistaient à la grossesse et sont plus une cause quune conséquence du syndrome vasculo-rénal. Des lésions de néphroangiosclérose importantes peuvent aussi être observées chez des patients avec syndromes de Bartter, diarrhées congénitales ou maladies des laxatifs, tous hypotendus chroniques mais dont le système rénine-angiotensine est considérablement activé en permanence. Ces observations sont reminiscentes de données expérimentales au cours desquelles des rats spontanement hypertendus mais dont lHTA est traitée dès la naissance développent des lésions de néphroangiosclérose. Enfin chez les animaux invalidés pour certains constituants du système rénine-angiotensine (angiotensinogène, récepteur AT1) et qui sont chroniquement hypotendus, des lésions extrèmement sévères de néphroangiosclérose sont constamment observées suggérant davantage lintervention de facteurs de croissance (rénine ?) dans la constitution des lésions vasculaires.
Des lésions non spécifiques similaires à la néphroangiosclérose peuvent être observées au cours du vieillissement normal, de lintoxication chronique par le plomb et comme lésions cicatricielles de microangiopathie thrombotique (au cours desquelles les lésions vasculaires précèdent lHTA).
Chez un malade hypertendu, le diagnostic de néphroangiosclérose est évoqué devant lassociation de :
- un tableau de néphropathie vasculaire chronique : élévation insidieuse de la créatinine pasmatique, isolée sans syndrome urinaire (la protéinurie est généralement < 1 g/j, la microhématurie absente), parfois associée à une hyperuricémie attribuée dans ce cas à une augmentation de la résistance vasculaire rénale.
- une hypertension de longue date, ayant précédé le début de latteinte rénale, et compliquée de rétinopathie, dhypertrophie ventriculaire gauche et de petit reins atrophiques bosselés symétriques.
- une contexte à hautrisque : noirs, gros fumeurs, hypertension très sévère, maladie rénale sous-jacente en particulier néphropathie diabétique
Cependant le diagnostic de néphroangiosclérose qui repose sur la biopsie rénale ne doit pas être trop libéralement posé devant un tableau de "néphropathie hypertensive". Une étude biopsique systématique a montré que chez des patients ayant une telle présentation 1/3 avait une néphropathie ischémique secondaire à une atteinte rénovasculaire bilatérale, 1/3 des lésions vasculaires (notamment embolies de cristaux de cholestérol) ou glomérulaires dautre nature, et 1/3 seulement des lésions de néphroangiosclérose.
3. Relations entre NAS et hypertension artérielle essentielle
La relation causale entre l'hypertension artérielle essentielle et l'insuffisance rénale terminale par néphroangiosclérose dite "bénigne" reste très controversée.
Sur un plan épidémiologique plusieurs études ont montré l'association entre le niveau de pression artérielle systolique et le risque de survenue d'une insuffisance rénale terminale. Cette relation ne prouve cependant pas formellement la responsabilité de l'HTA car les hypertensions artérielles secondaires à une maladie rénale sous-jacente sont souvent les plus sévères manométriquement.
- Dans l'étude MRFIT, 12 866 hommes hypertendus, âgés de 35 à 57 ans ont été suivis pendant 15 à 17 ans en moyenne. L'incidence de l'insuffisance rénale terminale était de 0,27 %. Le risque de survenue de l'insuffisance rénale est plus élevé chez les sujets ayant initialement une insuffisance rénale ou une protéinurie (et donc suspects de maladie rénale sous-jacente).
- Dans létude HDFP, lincidence dune augmentation de plus de 25% de la créatinine plasmatique, jusquà 177 µmol/l est <0,2% à 7 ans.
- Dans une étude rétrospective de 2125 patients hypertendus, le risque de survenue dune créatinine plasmatique > 177 µmol/l est inférieur à 2% à 5 ans. De plus 31 % de ces patients ont une protéinurie à lentrée dans létude suggérant une néphropathie sous-jacente, et il na été observé aucune relation entre les variations de la créatinine plasmatique et le niveau de pression artérielle diastolique.
- L'incidence de l'insuffisance rénale au cours des essais randomisés contrôlés du traitement de l'hypertension artérielle essentielle légère à modérée, est très faible. Dans 10 essais de ce type, totalisant 21 426 personnes, 50 malades traités activement par un traitement antihypertenseur développent une insuffisance rénale terminale contre 51 dans le groupe placebo.
Le paradoxe entre ces observations et le nombre important de sujet mis en dialyse avec un diagnostic de néphroangiosclérose (25% en 1997 aus Etats-Unis, 7% en Europe) est lié à plusieurs facteurs non mutuellement exclusifs :
- Le nombre de patients hypertendus est si important que même un petit pourcentage de sujet à risque représente un nombre non négligeable de sujet en insuffisance rénale terminale. Cependant en France où 50% de la population est hypertendue après 50 ans, on peut calculer que le risque théorique dinsuffisance rénale terminale secondaire à lhypertension ne concernerait que 1 sur 6000 hypertendus.
- La vitesse de progression est si lente que de nombreux patients peuvent ne pas être détectés au cours détudes durant 5 à 8 ans.
- Certains ou la plupart des patients pourraient avoir une néphropathie sous-jacente dont la progression est exacerbée par lhypertension. Il est en particulier difficile détablir dans ces études épidémiologioques si latteinte rénale est secondaire à lHTA ou à dautres facteurs favorisant comme lobésité, le diabète ou lintolérance aux glucides, lexposition au plomb, aux AINS ou à la cocaïne.
- Chez certains patients, des épisodes méconnus dHTA accélérée et partiellement corrigée pourraient contribuer à induire des lésions de néphroangiosclérose "maligne" et laisser des lésions vasculaires séquellaires.
- Enfin la classification américaine des affections vasculaires du rein est imprécise : le code "néphroangiosclérose" regroupe lensemble des atteintes vasculaires (néphroangiosclérose, embolies de cristaux de cholestérol, néphropathie ischémique réno-vasculaire, etc&), ce qui en fait un diagnostic "fourre-tout" surestimant le poids réel de lhypertension par rapport aux autres causes.
Il est important de considérer le rôle de facteurs raciaux ou génétiques dans le survenue de la néphroangiosclérose. Le risque de survenue dune insuffisance rénale terminale chez les sujets noirs hypertendus est 5 à 20 plus élevé que chez les sujets blancs. Ainsi dans une étude Nord-américaine le pourcentage dinsuffisance rénale terminale attribué à la néphroangiosclérose est de 9,6% chez les sujets noirs contre 0,6% chez les sujets blancs. Linsuffisance rénale liée à la néphroangiosclérose peut donc être considéré comme relativement rare chez les sujets blancs dorigine européenne. En revanche les sujets noirs présentent des HTA sévères, souvent malignes et ont tendance à développer une néphroangiosclérose précoce et évolutive conduisant à linsuffisance rénale terminale vers 50 ans.
Le traitement antihypertenseur inadéquat et le status socio-économique défavorisé (accès aux soins) ne semblent pas constituer une explication suffisante à ces différences de prévalence delon la race. Un nombre réduit de néphron fonctionnels, un petit poids à la naissance (en partie liés à une malnutrition maternelle), une sensibilité exagérée au sel, une réponse fibrogénique inadaptée sont différents facteurs de susceptibilité probablement impliqués dans cet excès de risque rénal qui est retrouvé aussi dans dautres formes de néphropathies. Par exemple, des études autopsiques chez de jeunes noirs strictement normotendus documentés et décédés de causes accidentelles ont montré une prévalence accrue de lésions de néphroangiosclérose. Un déterminisme génétique est aussi probalement favorisant chez les sujet européen avec un risque accru pour les sujets ayant le génotype DD du polymorphisme I/D de lenzyme de conversion de langiotensine.
Malgré son appellation le pronostic de la néphroangiosclérose n'est certainement pas "bénin" et ce terme faussement rassurant devrait être bani. Chez un hypertendu, l'augmentation de la créatinine plasmatique représente le facteur prédicteur le plus puissant du risque de morbidité-mortalité cardiovasculaire. Dans l'étude HDFP par exemple, le risque de mortalité cardiovasculaire augmente de façon proportionnelle au niveau de créatinine plasmatique avec un risque relatif de mortalité multiplié par 8 lorsque la créatinine plasmatique dépasse 250 µmol/l par rapport aux sujets ayant une fonction rénale inférieure à 110 µmol/l. L'augmentation de la créatinine plasmatique (x 2) est associée à une mortalité cardiovasculaire cumulée de 50 % à 8 ans.
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Mise-à-jour : mardi 26 juin 2001
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