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Diagnostic des HTA secondaires


OBJECTIFS
  • Savoir la relative fréquence des vascularites à ANCA (par rapport à la polyartérite noueuse classique
  • Penser à demander les ANCA devant des signes évocateurs
  • Identifier les formes de vascularites
  • Traiter précocement

 
NephroHUS Online PLAN DU CHAPITRE

Introduction

Les microvascularites à ANCA constituent la cause la plus fréquente de vascularites des petites vaisseaux primitives chez ladulte et comportent 3 sous-groupes :

  1. la granulomatose de Wegener,
  2. la micropolyangéite (ou polyangéite microscopique)
  3. et le syndrome de Churg et Strauss.


Ces microvascularites sont histologiquement identiques touchant les artérioles, les capillaires et les veinules mais pouvant également atteindre les artères et les veines. La granulomatose de Wegener est différenciée des deux autres par la présence dune inflammation granulomateuse nécrosante et labsence dasthme, le syndrome de Churg et Strauss est différencié par la présence dasthme, déosinophilie et dune inflammation granulomateuse nécrosante, et enfin la micropolyangéite différenciée par labsence dinflammation granulomateuse et dasthme. Un diagnostic rapide des microvascularites à ANCA est indispensable en raison du caractère menaçant vital dévolution rapide de ces atteintes et leur amélioration radicale par le traitement immunosuppresseur.

voir la figure "Représentation schématique des chevauchements nosologiques entre les formes de vascularites"

Les microvascularites à ANCA peuvent survenir à tout âge mais sont plus fréquentes chez ladulte âgé de 50 à 60 ans sans prédominance sexuelle. Lincidence annuelle est denviron 1 à 2 pour 100 000. Bien que ces microvascularites soient caractérisées par leur association avec des ANCA, il est important de noter quenviron 5 à 10 % de ces patients ne présentent pas dANCA détectables malgré des caractéristiques cliniques et histologiques identiques.

1) La granulomatose de Wegener

Environ 90 % des patients avec une granulomatose de Wegener ont des manifestations de larbre respiratoire haut ou bas. Les manifestations cliniques dune atteinte respiratoire haute comportent des douleurs sinusales, un jettage sinusal purulent, des ulcérations muqueuses nasales avec épistaxis et une otite moyenne. Des complications plus sévères comprennent la nécrose du septum nasal avec perforation aboutissant à la déformation du nez en selle.

voir la figure "Déformation en selle du nez à la suite d'une destruction inflammatoire du septum nasal au cours d'une maladie de Wegener"
voir la figure "Opacités sinusiennes témoignant de lesions granulomateuses au cours d'une maladie de Wegener"

La confirmation histologique (biopsies) est indispensable car les images ne sont pas spécifiques.

Des lésions du nerf facial par une otite moyenne entrainent une paralysie faciale. Linflammation trachéale et la sclérose souvent dans la région sous-glottique causent le stridor et peuvent entraîner des sténoses graves ds voies aériennes qui surviennent chez environ 15 % des adultes et environ 50 % des enfants atteints de cette maladie. Une minorité de patients manifestent initialement une atteinte respiratoire haute isolée mais la plupart ont par ailleurs une atteinte pulmonaire.
Linflammation granulomateuse nécrosante pulmonaire entraine des lésions denses nodulaires radiographiques alors que la capillarite alvéolaire est responsables dhémorragies pulmonaires et des infiltrats plus irréguliers et labiles. Lhémorragie pulmonaire massive induite par la capillarite est la manifestation la plus menaçante sur le plan vital des microvascularites à ANCA et nécessite linstitution durgence dun traitement immunosuppresseur "agressif".

voir la figure "Pneumopathie excavée au cours d'une maladie de Wegener"
voir la figure "Pneumopathie excavée : aspect scannographique au cours d'une maladie de Wegener"
voir la figure "Granulome nécrosant avec inflammation, vascularite et cultures négatives au cours d'une maladie de Wegener. Biopsie pulmonaire (H&E x 100)

Environ 80 % des patients avec une granulomatose de Wegener développement à un moment ou à un autre une glomérulonéphrite mais 20 % seulement présentent cette atteinte au stade initial. La glomérulonéphrite extracapillaire est caractérisée par la formation de croissants et de nécrose focale et labsence de dépôt dimmunoglobuline. Des lésions nécrosantes et pauciimmunes et une glomérulonéphrite extracapillaire surviennent également chez les patients atteints de micropolyangéite et de syndrome de Churg et Strauss ainsi que dans une forme de glomérulonéphrite extracapillaire dite pauciimmune limitée aux reins.

voir la figure "Glomérulonéphrite nécrosante avec un croissant cellulaire extracapillaire au cours d'une maladie de Wegener". Cette atteinte n'est pas totalement spécifique et peut se rencontrer au cours du syndrome de Churg et Strauss et surtout au cours de la micropolyangéite.
voir la figure "Glomérulonéphrite à croissant avec nécrose fibrinoide segmentaire et rupture de la membrane basale. Immunofluorescence négative. Coloration argent de Jones x 400.
voir la figure "Gloméulonéphrite nécrotique à croissants : intense infiltration de monocyte-macrophage localisée dans le croissant". (CD68, Immunoperoxidase x 250).

Dautres manifestations de la maladie comportent une inflammation oculaire, un purpura et des nodules cutanés, une neuropathie périphérique, des arthrites et différentes atteintes abdominales, viscérales.

voir la figure Sclérite nécrosante au cours d'une maladie de Wegener
voir la figure Ulcération linguale au cours d'une maladie de Wegener
voir la figure Nécrose digitale au cours d'une maladie de Wegener

La triade classique dune inflammation granulomateuse de larbre respiratoire dune microvascularite systémique et dune glomérulonéphrite nécrosante suggère très fortement le diagnostic mais des présentations plus atypiques, comme une sténose sous-glottique isolée ou une pseudo-tumeur orbitale sont moins évocatrices. Chez les patients ayant ces présentations atypipques, la mise en évidence dANCA est dune aide importante pour conforter un diagnostic de granulomatose de Wegener (voir la page "Valeur diagnostique des ANCA").

Le traitement dune granulomatose de Wegener active ainsi que celui de la micropolyangéite comporte trois phases : linduction dune rémission, la maintenance de la rémission, et enfin le traitement des rechutes.
Le traitement dinduction comporte habituellement du cyclophosphamide associé aux corticostéroïdes. Les corticostéroïdes seuls peuvent être suffisants pour améliorer une forme limitée peu évolutive de maladie mais savèrent inadéquats pour les patients ayant une maladie généralisée. Chez les patients ayant une granulomatose de Wegener ou une micropolyangéite agressive avec une glomérulonéphrite rapidement progressive ou des hémorragies pulmonaires, il est nécessaire de recourir à un traitement dinduction par méthylprednisolone intra-veineuse, à la dose de 7 mg/kg/jour pendant 3 jours suivis par des doses progressivement décroissantes de prednisone. Ce traitement set combiné avec du cyclophosphamide oral 2 mg/kg/jour ou du cyclophosphamide intra-veineux 0,5 à 1 g/m2 de surface corporelle par mois, dose adaptée en fonction de la numération des leucocytes. Un traitement combiné par corticostéroïdes et cyclophosphamide induit une amélioration dans plus de 90 % des patients ayant une granulomatose de Wegener et une rémission complète chez environ 75 %.

La stratégie ultérieure habituelle est darrêter les corticostéroïdes après lobtention de la rémission habituellement dans les 3 à 6 mois et de continuer le cyclophosphamide pendant 6 à 12 mois. Une stratégie alternative pour maintenir la rémission est de convertir le cyclophosphamide en azathioprine lorsque la rémission est obtenue.
Environ 50 % des patients avec une granulomatose de Wegener développement au moins une rechute dans les 5 ans. Le meilleur traitement pour ces rechutes reste controversé mais fait généralement appel à une réinstitution du traitement similaire à celui du traitement dinduction.

A la fois les glucocorticostéroïdes et le cyclophosphamide prédisposent à des infections sévères comportant une menace vitale et le cyclophosphamide peut causer de plus des cystites hémorragiques et une insuffisance gonadique ainsi que des cancers. Lincidence de tumeur vésicale après un premier traitement par cyclophosphamide est denviron 5 % à 10 ans et 16 % après 15 ans. Les risques et les bénéfices dune immunosuppression agressive doivent donc être évalués chez chaque patient et le traitement individualisé. Il faut rester vigilant pour le diagnostic et le traitement des complications secondaires à ces formes de traitement.
Un traitement moins "aggressif" peut être suffisant chez des patients ayant une granulomatose de Wegener localisée ou faiblement évolutive. Lassociation de faibles doses de méthotrexate + prednisone permet dobtenir une rémission chez environ 70 % des patients atteints de Wegener non sévère. Le méthotrexate pourrait également être utile pour le maintien de la rémission. Cependant lutilisation du méthotrexate est limitée chez les patients atteints dinsuffisance rénale en raison dune toxicité accrue.

Les rechutes du Wegener étant associées des infections de larbre respiratoire et au portage nasal chronique du Staphylocoque Aureus une prophylaxie des rechutes par un agent antimicrobien (cotrimoxazole, Bactrim® oral ou mupirocine Bactroban® nasale) a été proposé mais avec des résultats divergents.

2) Polyangéite microscopique

La micropolyangéite est caractérisée par une vascularite des petits vaisseaux, nécrosante, pauci-immune sans élément clinique ou histologique dinflammation granulomateuse nécrosante. Plus de 80 % des patients atteints de micropolyangéite ont des ANCA, le plus souvent des ANCA périnucléaires (MPO ANCA). Ceci permet généralement de distinguer la polyangéite microscopique dautres microvascularites ANCA négatives mais ne permet de différencier la polyangéite microscopique des autres formes de microvascularite à ANCA (Wegener et Churg & Strauss). La combinaison dANCA positifs et dune sérologie négative pour le VHB aide à différencier la micropolyangéite (ANCA+, VHB-) de la polyartérite noueuse (ANCA-, VHB+).

Histologiquement, la polyangéite microscopique entraine une artérite nécrosante qui est histologiquement identique à celle induite par la polyartérite noueuse. Cependant par définition, la polyartérite noueuse et la polyangéite microscopique sont différenciées histologiquement par labsence de vascularite dans des vaisseaux autres que les artères dans la polyartérite noueuse et la présence dune vascularite de vaisseaux plus petits que les artères (artérioles, veinules et capillaires) dans la polyangéite microscopique. Selon cette définition, la présence dune veinulite leucocytoclasique cutanée, dune glomérulonéphrite dune capillarite alvéolaire pulmonaire ou dune vascularite dans nimporte quel vaisseau de calibre inférieur à celui dune artère exclut le diagnostic de polyartérite noueuse et indique une forme de vascularite des petits vaisseaux. Inversement, lidentification dune artérite nécrosante dans une biopsie de muscle ou dun nerf périphérique suggère une forme de vascularite nécrosante mais nest pas caractéristique de la polyartérite noueuse car beaucoup dautres vascularites nécrosantes tels que la polyangéite microscopique, la granulomatose de Wegener et le syndrome de Churg et Strauss peuvent également toucher les artères.

voir la figure "Diagnostic différentiel des vascularites selon le type de vaisseaux atteints"

La polyangéite microscopique est responsable du même spectre de manifestations de vascularite des petits vaisseaux que la granulomatose de Wegener mais ne comporte pas dinflammation granulomateuse. Environ 90 % des patients développent une glomérulonéphrite extracapillaire ainsi quune atteinte de nombreux autres organes en particulier une capillarite alvéolaire hémorragique. La polyangéite microscopique est la cause la plus fréquente de syndrome pneumo-rénal.

voir la figure "Hémorragie pulmonaire massive par capillarite alvéolaire au cours d'une micropolyangéite"

voir la figure "Glomérulonéphrite nécrosante au cours d'une micropolyangéite"

Microscopie optique. Coloration argentique

La polyangéite microscopique dans sa forme systémique est traitée par une combinaison de corticostéroïdes et dagents cytotoxiques de façon analogue à celle de la granulomatose de Wegener. La capillarite alvéolaire avec hémorragie pulmonaire représente la complication vitale la plus menaçante et doit être traitée durgence par une combinaison thérapeutique corticostéroïdes + cyclophosphamide et peut être par des échanges plasmatiques. La glomérulonéphrite est habituellement rapidement progressive et une combinaison de fortes doses de corticostéroïdes et de cyclophosphamide permet dobtenir une rémission dans environ 80 % des cas. Le facteur principal de mauvaise évolution rénale est le délai entre le développement de linsuffisance rénale et la mise en route du traitement. Des rechutes sont possibles dans environ 1/3 des patients au bout de 2 ans. Environ 2/3 des patients qui récidivent répondent à un nouveau traitement immunosuppresseur similaire à celui du traitement dinduction.

Un point pratique important est que dans la mesure où le traitement de la polyangéite microscopique et de la granulomatose de Wegener sont identiques lorsquil existe une atteinte systémique sévère, il nest pas nécessaire de distinguer formellement ces deux variétés proches de microvascularite à ANCA avant de démarrer le traitement.

3) Angéite granulomateuse de Churg & Strauss

Le syndrome de Churg & Strauss présente 3 phases : la rhinite allergique avec asthme ; une maladie infiltrative à éosinophile, telle quune gastroentérite ou pneumopathie à éosinophile ; et une vascularite des petits vaisseaux avec inflammation granulomateuse.
La phase vascularitique se développe habituellement dans les 3 ans après le début de lasthme quoique dans certains cas ce délai peut durer plusieurs dizaines dannées. Environ 70 % des patients présentent des ANCA, habituellement des ANCA périnucléaires (MPO ANCA). Pratiquement tous les patients ont une éosinophilie, définie par plus de 10 % des éosinophiles dans le sang. Par comparaison avec la granulomatose de Wegener et la polyangéite microscopique, le syndrome de Churg et Strauss atteint moins fréquemment et moins sévèrement le rein mais plus souvent les nerfs périphériques et les coronaires. Lartérite coronaire et la myocardite sont les principales causes de morbidité et de mortalité représentant environ 50 % des décès ; ces complications sont améliorées par un traitement précoce.

voir la figure Scanner pulmonaire d'un patient atteint de syndrome de C&S : épaississement des structures interstitielles sous pleurales ainsi que des artères pulmonaires. Les bronches adjacentes sont normales. Des infiltrats parenchymateux pommelés tradiusent la pneumopathie à éosinophiles.
voir la figure "Artérite granulomateuse éosinophilique du poumon dans un syndrome de Churg & Strauss"

Un traitement par corticothérapie à hautes doses seul est souvent suffisant. Cependant une maladie réfractaire ou récidivante peut nécessiter laddition dun agent cytotoxique selon un schéma thérapeutique comparable à celui utilisé dans la granulomatose de Wegener.

 Pr T. Hannedouche


LECTURES RECOMMANDÉES

Jennette JC et al. Nomenclature of systemic vasculitides. Arthritis & Rheumatism 1994;37:187

Jennette JC, Falk RJ. Small-vessel vasculitis. New Engl J Med 1997;337:1512

Jennette JC et al. Diagnostic predictive value of ANCA serology. Kidney Int 1998; 53:796

 

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Mise-à-jour  vendredi 5 mai 2000

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